Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d'impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.
En ce qui concerne le paragraphe 3 de l’article 9, les rapporteurs ont pu observer, au cours de presque toutes les consultations, que la majorité des communes se trouve dans une situation financière difficile, caractérisée par un fort endettement et des dettes impayées, ce qui leur cause de nombreux problèmes pour fonctionner et remplir leurs obligations légales. La crise économique et financière, les modifications apportées à la législation qui réglemente le système de financement des collectivités locales et un niveau élevé de dépenses publiques à l’échelle locale sont les principales raisons qui ont conduit à cette situation, en particulier après le boom de l’investissement au Monténégro.
La suppression des droits d’utilisation des terrains constructibles (au 1er janvier 2009) est la mesure qui a eu les conséquences les plus négatives sur les recettes des collectivités locales. L’Union des municipalités du Monténégro a informé la délégation que dans l’ensemble, les recettes tirées de ces droits par les communes en 2008 s’élevaient à 29 013 631 €. En conséquence, les recettes calculées sur cette base pour la période 2009-2014 s’élèveraient à quelque 174 millions d’euros. Etant donné que la dette totale des collectivités locales fin 2014 atteignait 166,94 millions d’euros1, les conséquences négatives de la suppression de ces droits sont évidentes, ainsi que son influence nuisible sur la stabilité des finances locales.
La loi sur les droits d’utilisation des services publics (entrée en vigueur le 1er janvier 2008) a supprimé ces droits pour l’exploitation d’installations de transport d’électricité, l’utilisation d’installations de télécommunication et l’installation d’émetteurs-récepteurs télé/radio, c’est-à-dire qu’elle a supprimé ces droits pour les entités les plus rentables. L’Union des communes du Monténégro tient à attirer l’attention sur le fait que, avant ces changements, les collectivités locales en tiraient les revenus suivants : 9 309 775 € (en 2007), 6 079 575 € (en 2008), alors qu’en 2009 ce montant s’élevait à seulement 3 638 497 €. Les modifications législatives ont privé les communes d’au moins 3 millions d’euros de revenus par an depuis 2008, soit 21 millions d’euros au total pour les sept ans allant jusqu’à 2014.
En outre, la loi sur le financement de l’autonomie locale a supprimé les taxes : à la consommation, sur l’enregistrement des dénominations sociales et sur les jeux de hasard et de divertissement (loteries), qui généraient environ 5,5 millions d’euros en faveur des communes en 2010, ce qui représente un manque à gagner de quelque 22 millions au total pour les communes sur quatre ans. Par ailleurs, en 2011, la redevance pour l’utilisation de véhicules et de remorques motorisés (écotaxe) a été elle aussi supprimée par le Décret sur les modifications et amendements du Décret relatif au montant, à la méthode de calcul et au paiement de la taxe contre la pollution de l’environnement, alors qu’elle était définie dans la loi sur le financement de l’autonomie locale comme un revenu transféré aux communes et qu’elle avait rapporté 926 831,40 € en 2011.
La modification de la loi sur les routes a également diminué les recettes des collectivités locales en obligeant les collectivités à solliciter l’approbation du gouvernement pour fixer le montant des droits d’utilisation des voies municipales. Cette taxe générait 6 214 159 € en faveur des collectivités locales en 2009, contre 2 765 753 € en 2010 et jusqu’à 2014, avec de légères variations. Le manque à gagner pour la période allant jusqu’à 2014 a été chiffré à environ 17,5 millions d’euros. En tout état de cause, les revenus tirés de cette taxe par les communes sont totalement insuffisants pour assurer l’entretien et la protection des routes, alors que c’est sa finalité principale.
Il importe de souligner que la loi sur le financement de l’autonomie locale, dont les dernières modifications sont entrées en vigueur le 1er janvier 2011, accorde aux communes un pourcentage plus élevé de revenu transféré ainsi qu’une part plus élevée de fonds provenant du fonds de péréquation. D’autre part, la loi relative à l’impôt sur les biens immobiliers, dont les dernières modifications sont entrées en vigueur le 1er janvier 2011 également, fixe un taux plus élevé pour cette taxe et prévoit une assise fiscale plus large. Entretemps, le 17 février 2015, le Parlement du Monténégro a adopté la loi sur les modifications et amendements de la loi relative à l’impôt sur les biens immobiliers, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2016.
Les collectivités locales ont augmenté leurs recettes dans la période 2011-2014, par rapport à 2010, dans les domaines suivants (les montants sont approximatifs) : impôt sur les biens immobiliers (32,5 millions d’euros) ; impôt sur le revenu (8,82 millions d’euros) (il faut noter que la loi sur l’impôt sur le revenu – dit « impôt de crise », introduite en 2013, a incontestablement joué un rôle dans l’élargissement de l’assise fiscale sur laquelle repose le calcul de cet impôt) ; impôt sur la vente de biens immobiliers (8,5 millions d’euros) ; droits de concession (12,72 millions d’euros) et fonds provenant du fonds de péréquation (24,38 millions d’euros), soit un montant total d’environ 87 millions d’euros, ce qui est loin d’être suffisant pour compenser la perte de revenus enregistrée dans la période précédente2 .
L’évolution des recettes totales des collectivités locales parle d’elle-même : 347 848 909 € en 2008, 238 010 575 € en 2010, 227 350 223 € en 2013 et 230 256 314,61 euros en 20143 .
Il est donc évident que les communes n’ont pas disposé des fonds suffisants pour mener à bien les projets entrepris et assurer leurs fonctions, par ailleurs plus nombreuses. Elles ont compensé cette perte de recettes par la vente de terrains et la souscription de crédits coûteux, ce qui a rapidement entraîné un endettement substantiel et un montant élevé d’impayés (119,19 millions d’euros au total fin 2014, 116,80 millions d’euros en 2013, 109,81 millions d’euros en 2012 et 98,53 millions d’euros en 2011). L’endettement total des collectivités locales a également affiché une tendance à la hausse, avec 166,94 millions d’euros en 2014 (et un pic en 2013, à 170,54 millions d’euros).
Les autorités centrales ont reconnu que se posait un problème d’équilibre des budgets municipaux et ont pris un certain nombre de mesures pour y remédier. Ces mesures comprennent, entre autres, la reprogrammation de la dette fiscale et la prestation des garanties de l'Etat pour le refinancement des zones concernées. En outre, le Gouvernement a informé la délégation du Congrès de ses efforts réalisés conjointement avec l'Union des municipalités dans la préparation d'une analyse de la viabilité des finances publiques locales, en évaluant en particulier l'adéquation des ressources financières disponibles à la lumière des compétences des municipalités. Dans ce contexte, l’Union des municipalités du Monténégro a lancé plusieurs activités visant à améliorer notablement les finances publiques locales. A cet égard, le conseil d’administration de l’Union des communes a adopté des propositions de mesures pour surmonter la situation financière difficile dans laquelle se trouvent les collectivités locales, propositions qui ont été envoyées à toutes les autorités nationales compétentes et dont la mise en œuvre a commencé. Les mesures concernent trois domaines : la rationalisation des coûts de fonctionnement, l’amélioration du cadre juridique et le refinancement de la dette et des engagements non soldés.
Rationalisation des coûts de fonctionnement : D’après les conclusions du gouvernement, les organes des collectivités locales doivent contribuer de manière substantielle à la stabilisation des finances publiques locales, en accroissant l’efficacité de leurs interventions, et à la rationalisation des coûts de fonctionnement. Les mesures suivantes sont donc prioritaires à l’échelon local : mettre en place une organisation optimale et fonctionnelle des autorités municipales et des services publics aux fins de rationaliser les coûts ; adopter des règlements municipaux visant à mettre en application toutes les dispositions légales relatives aux revenus propres des collectivités locales ; prendre toutes les mesures définies par la loi aux fins de la collecte efficace des recettes publiques locales ; élaborer un plan d’optimisation des effectifs des collectivités locales, conformément aux obligations définies dans le plan de réorganisation interne de la fonction publique adopté par le gouvernement du Monténégro en juillet 2013, qui envisage une réduction de 10 % des agents employés par les communes d’ici fin 2016.
Amélioration du cadre juridique : D’après les conclusions du conseil d’administration de l’Union des communes, la viabilité et la stabilisation des finances publiques à l’échelon local exigent une amélioration du cadre juridique régissant le système de financement des collectivités locales. A cet égard, le Parlement du Monténégro a adopté la loi sur les modifications et amendements de la loi relative à l’impôt sur les biens immobiliers à sa session du 17 février 2015, améliorant de ce fait notablement les dispositions individuelles de réglementation du système d’établissement et de collecte de cet impôt en tant que source principale de revenu des collectivités locales. La loi sur les modifications et amendements de la loi sur le financement de l’autonomie locale est en cours d’élaboration, conformément au programme de travail du gouvernement pour le deuxième trimestre 2015, et c’est l’occasion d’améliorer et de renforcer le système de finances des communes.
En ce qui concerne la loi sur le financement de l’autonomie locale, l’Union des communes a soumis, par le biais de sa commission compétente et des membres du groupe de travail mixte, plusieurs propositions et suggestions visant à définir un modèle de compensation des recettes perdues par les collectivités locales à la suite des nombreuses modifications de la loi. Il est ainsi proposé de transférer un pourcentage de revenu plus élevé aux communes, de revoir les dispositions individuelles dont la mise en œuvre concrète a mis au jour des insuffisances, d’adopter les réglementations nécessaires pour introduire certaines sources de revenus pour les collectivités locales (redevance pour la protection et l’amélioration de l’environnement, taxe sur les terres agricoles en friche), de réglementer les questions relatives à l’accès au fonds de péréquation pour les nouvelles communes qui n’ont pas encore de marge de manœuvre budgétaire suffisante, etc.
L’Union des communes a également présenté une initiative d’urgence au parlement pour examen lors de sa session de 2015, proposant l’adoption d’une loi sur les affaires communales et d’une loi sur la légalisation des structures construites illégalement, présentées comme essentielles pour le fonctionnement et les finances des collectivités locales.
Refinancement de la dette et des engagements non soldés : Afin d’assurer la viabilité à long terme des finances publiques à l’échelon local, il est particulièrement important de créer un modèle durable du refinancement de la dette et des engagements des organes des collectivités locales contractées à l’égard des institutions financières, d’autres fournisseurs, d’employés, etc., et de financer un programme de sensibilisation afin d’optimiser les effectifs au niveau local. D’après les informations fournies par les organes des collectivités locales au ministère des Finances, le montant total des impayés des communes s’élevait, fin 2014, à 119,19 millions d’euros, tandis que la dette consolidée des communes ce même jour s’élevait à 166,94 millions d’euros. Ces montants montrent une tendance à la hausse par rapport aux années précédentes, et des mesures d’urgence sont nécessaires pour réduire les dépenses liées au service des dettes, c’est-à-dire pour restructurer les dettes contractées du fait de taux d’intérêt élevés et de durées de remboursement courtes. Par conséquent, le règlement de ce passif est possible uniquement si des conditions plus favorables sont négociées avec les banques, avec des taux d’intérêt inférieurs et une durée plus longue (10 à 15 ans).
Le gouvernement du Monténégro a adopté, à sa session du 26 mars 2015, le rapport sur l’état de la dette et des engagements non soldés des collectivités locales, daté du 31 décembre 2014, et conclu que le refinancement de la dette et des engagements non soldés lié aux dépenses d’investissement des communes bénéficiaires du fonds de péréquation devait être géré de sorte que les communes bénéficiaires signent un accord de cession avec le ministère des Finances et le créancier, en vertu duquel les fonds seront utilisés pour rembourser les engagements et crédits refinancés.
Le gouvernement a également chargé le fonds d’investissement et de développement du Monténégro d’apporter des fonds, ou une garantie, aux organes des collectivités locales pour leur permettre de négocier des conditions favorables pour la restructuration de leurs dettes.
L’assise financière de la plupart des organes des collectivités locales étant insuffisante, le gouvernement du Monténégro a proposé, à sa session du 30 avril 2015 et sur proposition du conseil d’administration de l’Union des communes, que les autorités compétentes des collectivités locales qui prévoient une restructuration de leurs dettes prenne la décision d’autoriser le ministère des Finances à utiliser leur part de revenus du fonds de péréquation, en gardant à l’esprit la nature de ces revenus, afin de fournir un instrument stable et sûr de financement des collectivités locales.
Le gouvernement a en outre autorisé le ministère des Finances à élaborer des accords de cession avec les collectivités locales et le fonds d’investissement et de développement du Monténégro, ou avec d’autres institutions financières, en vue d’autoriser le ministère des Finances à utiliser les fonds du fonds de péréquation pour régler le passif des communes découlant de crédits contractés pour restructurer leurs dettes.
La plupart des organes des collectivités locales ont déjà pris les décisions nécessaires à cette fin et entrepris de négocier des crédits avec les institutions financières aux conditions les plus favorables possible, aux termes desquelles les dettes contractées à l’égard des banques et d’autres fournisseurs seront restructurées.
1 Informations fournies par l'Union des communes du Monténégro, notamment dans son document intitulé « Financement des collectivités locales : évaluation de la situation ».
2 Données fournies par l'Union des communes du Monténégro.
3 Données fournies par l'Union des communes du Monténégro.