Albanie

Albanie - Rapport de monitoring

Date de la visite de monitoring : 17-18 mars 2021 à distance
Date d'adoption du rapport: 13 décembre 2021

Ce rapport fait suite à la troisième visite de suivi, effectuée à distance, en Albanie depuis que le pays a ratifié la Charte européenne de l'autonomie locale en 2000.

Il reconnaît que des progrès substantiels ont été réalisés pour sécuriser l'autonomie locale depuis l'adoption en 2013 de la dernière recommandation du Congrès sur la démocratie locale et régionale en Albanie, notamment grâce à la mise en œuvre de la stratégie globale 2015-2020 de décentralisation et de gouvernance locale et aux réformes de la législation sur l'autonomie locale qui en découlent.

Toutefois, les rapporteurs ont également constaté que le transfert de compétences du gouvernement central vers les autorités locales n'a pas encore abouti à une répartition suffisamment claire des fonctions entre les niveaux central et local ; les pouvoirs délégués sont exercés sous la supervision étroite des différents ministères concernés et la marge d'initiative des autorités locales est assez limitée ; les municipalités, y compris les plus grandes, ne disposent toujours pas de ressources financières suffisantes pour répondre à tous leurs besoins. En outre, les ressources humaines continuent de poser des problèmes, en particulier dans les zones rurales, et le niveau régional de gouvernement n'a pas pleinement bénéficié des réformes territoriales de ces dernières années.

En conséquence, la recommandation invite les autorités nationales à poursuivre le processus de décentralisation initié par la " Stratégie nationale transversale de décentralisation et de gouvernance locale" 2015-2020 et confirmé par le plan d'action 2020-2022, et à harmoniser davantage la législation sur la répartition des responsabilités entre les autorités centrales et locales. Les rapporteurs recommandent aux autorités nationales de réviser la structure salariale des collectivités locales afin de permettre aux autorités de bénéficier d'une plus grande flexibilité et d'accroître leur capacité à recruter et à conserver du personnel qualifié. Ils invitent également les autorités albanaises à ratifier le protocole additionnel à la Charte européenne des collectivités locales et de l'autonomie locale sur le droit de participer aux affaires d'une collectivité locale.

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Article ratifié Ratifié avec réserve(s) Non ratifié
Conformité Conformité partielle Non conformité A déterminer
Tout déplier
Tout replier
Article 2
Fondement constitutionnel et légal de l'autonomie locale - Article ratifié

Le principe de l'autonomie locale doit être reconnu dans la législation interne et, autant que possible, dans la Constitution.


Dispositions constitutionnelles

L’article 13 de la Constitution affirme qu’en Albanie, les gouvernements locaux sont fondés sur le principe de décentralisation du pouvoir et qu’ils sont exercés selon le principe de l’autonomie locale.

Les articles 108-115 définissent les principes qui régissent les collectivités locales. Ainsi, l’article 108(1) dispose que les collectivités locales sont des communes, des municipalités et des régions, tandis que l’article 108(2) prévoit que les limites territoriales locales ne peuvent être modifiées sans consultation préalable des habitants.

L’article 109 (1) dispose que les organes représentatifs des collectivités locales de base sont des conseils élus, en général, tous les quatre ans au suffrage direct et secret. En outre, le maire de la municipalité et le chef de la commune, en leur qualité d’organe exécutif de la collectivité locale, sont élus directement de la même manière.

L’article 110 dispose que la région (composée de plusieurs collectivités locales de base) est l’unité où les politiques régionales sont élaborées, mises en œuvre et harmonisées en fonction des politiques nationales.

Les compétences de base et le principe du droit à l’autonomie fiscale locale, énoncés à l’article 113, disposent que les conseils des communes, des municipalités et des régions réglementent et administrent les questions locales, de manière indépendante, au sein de leur juridiction en exerçant les droits de propriété, en administrant tous les revenus générés à l’échelon local, en ayant le droit d’exercer une activité économique et le droit de collecter et dépenser les revenus nécessaires à l’exercice de leurs fonctions. En vertu de cet article, les collectivités locales doivent avoir le droit d’adapter les ressources fiscales, dont elles peuvent disposer librement dans le cadre de leurs compétences.

Dispositions législatives

La loi organique sur l’organisation et le fonctionnement des gouvernements locaux, n° 8652 de juillet 2000 a été la principale loi adoptée dans le cadre de la réforme de la décentralisation. Elle affirme les droits et les compétences des collectivités locales en conformité avec la Constitution et avec la Charte européenne de l’autonomie locale, et elle établit le cadre des relations entre les pouvoirs locaux et le pouvoir central. Aux termes de cette loi, il est clair que les communes jouissent d’une large autonomie pour un vaste éventail de fonctions en matière de services publics, de développement économique, d’activités sociales et culturelles, d’ordre public et de protection.

La loi n° 115/2014 du 31/07/ 2014 « Sur la division administrative-territoriale des collectivités locales de la République d'Albanie » dont l'objectif principal était d'améliorer l'efficacité et la qualité des services de l'administration locale et de promouvoir un développement territorial équitable a prévu une division administrative en 12 régions (qarks) et 61 municipalités.

La loi-cadre n°139/2015 "Sur l'autonomie locale en République d'Albanie" dispose dans son article 4 (1) que les organes des collectivités locales autonomes fonctionnent selon le principe de l'autonomie locale. Cette loi a transféré d'importantes responsabilités en matière de services publics aux municipalités en tant que fonctions propres. Les nouvelles fonctions qui ont été transférées aux municipalités sont :

i.     les services sociaux ;

ii.     le personnel de l'éducation préscolaire et le personnel de soutien du système pré-universitaire ;

iii.    la gestion des forêts et des pâturages ;

iv.    la gestion du système d'égouts secondaire et tertiaire pour l'irrigation et le drainage ;

v.    les centres de secours en cas d'incendie ;

vi.    et la gestion des routes rurales.

La loi n°107/216 « Sur le préfet de région » qui détermine le rôle du préfet de région, sa mission et ses compétences en tant que représentant du Conseil des ministres au niveau régional.

La loi n° 68/ 2017 « Sur l'autonomie financière des collectivités territoriales » est la toute première loi globale sur les finances des collectivités locales. Elle réunit tous les principes et les procédures concernant les sources de revenus des collectivités locales, la gestion des dépenses et le dialogue et la consultation intergouvernementaux qui s'y rapportent.

Par ailleurs, plusieurs modifications des textes législatifs et règlementaires liés à l’autonomie locale ont été adoptées, afin de préciser le cadre des fonctions décentralisées et nouvelles fonctions déléguées. A titre d’exemple, on peut citer :

• Les règlements sur la perception des impôts immobiliers et des impôts locaux, les lignes directrices pour l’organisation budgétaire des collectivités locales

• Le cadre réglementaire et d'orientation de la loi no. 107/2014 « Sur l'aménagement et le développement du territoire », y compris la Décision du Conseil des ministres (n ° 686, de 2017) « Sur la réglementation et l'aménagement du territoire », sur la réglementation et le détail du processus

Article 3.1
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques.


D’après la Charte, les collectivités locales doivent régler et gérer une « part importante des affaires publiques ». La Charte laisse aux États une certaine marge d’appréciation pour fixer « le cadre de la loi » et définir le rayon d’action des collectivités locales. Cependant, la Charte souligne que la part des affaires publiques gérée par les collectivités locales doit être « importante » et non résiduelle. En d’autres termes, les collectivités locales doivent exercer un ensemble de responsabilités leur permettant de mettre en œuvre des politiques publiques locales au profit de la population locale.

Les collectivités locales ne peuvent pas véritablement régler et gérer une « part importante des affaires locales » si ces autorités sont trop petites et/ou privées des ressources nécessaires pour accomplir leurs tâches. Par conséquent, les fusions de communes peuvent être souhaitables dans certains cas. Une autre possibilité est le recours à la coopération municipale en vue d’une prestation conjointe des services.

« L’autonomie locale » en Albanie est définie par la loi 139/2015 comme « le droit et la capacité des collectivités locales, établies par la Constitution dans les limites de la présente loi, de régler et de gérer une partie substantielle des affaires publiques sous leur propre responsabilité et dans l'intérêt de la communauté ».  Cette disposition est conforme à l’intention de la Charte selon laquelle les collectivités locales doivent disposer d’une vaste gamme de responsabilités de nature à être exercées au niveau local. A cet égard, la loi 139/2015 a transféré d'importantes responsabilités en matière de services publics aux municipalités en tant que compétences propres, lesquelles sont détaillées dans les articles 21 à 33 de la loi. Elle a supprimé le concept de fonctions partagées et a décentralisé plusieurs nouvelles fonctions au niveau local.

L’article 8 de la loi 139/2015 sur l’autonomie locale dispose par ailleurs que « Les organes des collectivités locales autonomes peuvent prendre des initiatives d'intérêt public local dans les territoires sous leur juridiction sur toute question à moins qu'elle ne soit légalement interdite ou confiée exclusivement à un autre organisme ».

La capacité effective de régler et gérer efficacement « une part importante des affaires publiques » a été renforcée par la réforme territoriale de 2015 qui a regroupé 373 municipalités et communes en 61 municipalités (loi 115/ 2015). La création de ces grandes municipalités a permis d’accroitre le rôle des gouvernements locaux dans le système d'administration publique et d’assurer une gestion plus efficace des services publics locaux. Cette capacité se trouve cependant limitée par l’insuffisance des ressources destinées à financer l’exercice des compétences attribuées aux municipalités (voir articles 9.1 et 9.2).

Les rapporteurs ont également relevé que l’échelon régional n’a pas pleinement bénéficié des réformes territoriales intervenues ces dernières années. Certes, selon la loi 139/2015 sur l’autonomie locale, « les régions constituent l'unité de deuxième niveau de l'autonomie locale », mais il apparait que leur rôle reste encore limité. Les régions ont comme fonction principale de contribuer à développer et à mettre en œuvre les politiques régionales en matière de développement économique et de veiller à leur harmonisation avec les politiques nationales. En réalité,elles apparaissent plutôt, dans la pratique, comme un échelon de la déconcentration administrative, leur marge d’initiative étant réduite et les principales décisions en matière d’investissements restant du ressort de l’État, à travers le fonds de développement des régions. Leconseil régional n’est toujours pas élu au suffrage universel direct mais composé de représentants des organes élus des municipalités constituantes, ce qui n’est pas de nature à lui permettre d’affirmer sa pleine légitimité démocratique.

Par ailleurs, la loi 102/2020 « sur le développement régional et la cohésion » a prévu la création par le gouvernement de 4 régions administratives destinées à servir de cadre aux politiques de développement et de cohésion au niveau régional. La création de ces nouvelles structures administratives ne manque pas de poser la question du devenir du rôle effectif des régions actuelles et des chevauchements possibles entre ces deux niveaux d’administration. Elle traduit par ailleurs une approche centralisée dans l’élaboration et l’application des politiques de développement régional difficilement compatible avec les exigences de l’autonomie locale.

Article 3.2
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Ce droit est exercé par des conseils ou assemblées composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel et pouvant disposer d'organes exécutifs responsables devant eux. Cette disposition ne porte pas préjudice au recours aux assemblées de citoyens, au référendum ou à toute autre forme de participation directe des citoyens là ou elle est permise par la loi.


En Albanie, les conseils locaux sont les organes représentatifs des municipalités.Comme le prévoit
l’article 109 de la Constitution, leurs membres sont directement élus par les citoyens. Les élections locales se tiennent tous les quatre ans à l’échelle du pays tout entier, à la proportionnelle, sur listes bloquées. Les maires et les chefs de commune sont élus au suffrage direct selon un système majoritaire et à bulletins secrets. Les modifications apportées en juillet 2012 au Code électoral de l’Albanie, en vertu de la loi no 74/2012, ont donné à des groupes d’électeurs le droit de présenter des candidats aux conseils locaux. Il n’est pas possible pour un candidat de se présenter à plus d’un conseil. Par ailleurs, un candidat proposé par un groupe d’électeurs ne peut être soutenu, directement ou indirectement, par d’autres candidats d’une entité électorale (par exemple un parti politique) en lice pour la même élection. Seuls les citoyens ayant une résidence permanente sur le territoire de la collectivité sont éligibles aux conseils locaux et en tant que maires.

Il convient de noter la présence de 50% de femmes dans les conseils municipaux, les listes de candidats aux élections municipales devant être paritaires.

Les élections locales de juin 2019 n'ont pas été propices au renforcement de la démocratie locale en Albanie. Elles ont été boycottées par l’opposition qui, de ce fait, ne dirige aucune municipalité. Comme l’a souligné la délégation de Haut niveau du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe, à l’occasion de sa mission à Tirana du 4 au 6 février 2020[3], cette régression du pluralisme dans les municipalités est de nature à conduire à une nouvelle érosion de la confiance des citoyens dans les institutions de ce pays. Le gouvernement et l'opposition ne doivent pas rester indifférents face à une telle situation et ils doivent agir de manière responsable, en fonction de leurs rôles spécifiques dans le processus démocratique, afin de garantir des élections offrant un choix pluraliste aux électeurs, notamment au niveau local.

Le recours de l'Association des municipalités d'Albanie concernant la constitutionnalité du processus électoral du 30 juin 2019 est actuellement pendant devant la Cour constitutionnelle d’Albanie qui est redevenue opérationnelle en décembre 2020[4].

Les rapporteurs sont d’avis que le progrès des réformes menées en Albanie pour renforcer la démocratie locale et la confiance de la population à l’égard des institutions étatiques restent toujours tributaires de la capacité du gouvernement et de l’opposition de coopérer sur la base d’un dialogue politique démocratique.

En ce qui concerne l’échelon régional, il n’est pas élu au suffrage universel direct mais composé de représentants des organes élus des municipalités constituantes. Comme cela a déjà été souligné dans le rapport précédent, les règles de composition des conseils régionaux restent problématiques, car l’article 3 paragraphe 2 de la Charte exige expressément que les organes délibératifs des collectivités locales, quel que soit leur niveau, soient composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel.

Enfin, en ce qui concerne le droit de participer aux affaires d’une collectivité locale, selon les rapporteurs, le chapitre VI de la loi intitulé « transparence, consultation et participation civique », devrait recevoir pleine application. Afin de garantir la participation du public aux processus décisionnels locaux des instruments de démocratie participative devraient être institués. Certes, des progrès ont été accomplis dans le domaine de l'accès à l'information : un nombre croissant de municipalités ont divulgué des informations publiques et nommé un coordinateur local chargé du droit à l'information. Mais le cadre institutionnel de la participation du public à la prise de décision locale, en particulier dans le processus de budgétisation, devrait être renforcé pour toutes les municipalités.

Article 4.1
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences de base des collectivités locales sont fixées par la Constitution ou par la loi. Toutefois, cette disposition n'empêche pas l'attribution aux collectivités locales de compétences à des fins spécifiques, conformément à la loi


Ce sont les articles 23 à 30 de la loi 139/2015 sur l’autonomie locale qui déterminent les compétences des municipalités. Celles-ci exercent des fonctions exclusives et des fonctions déléguées par les institutions du gouvernement central.

Les fonctions exclusives concernent les infrastructures et les services publics, les services sociaux, la culture, le sport et les loisirs, la protection de l'environnement, l'agriculture, le développement rural, les forêts et pâturages publics, la nature et la biodiversité, le développement économique local et la sécurité publique.

En 2016, à la fin de la première année de mise en œuvre de la réforme administrative territoriale, les municipalités ont consacré, en moyenne, 26% de leurs budgets pour l'administration, 21% pour l’infrastructure publique, 21% pour les services publics (nettoyage, enlèvement des déchets, éclairage public, espaces verts, etc ); 20% pour les jardins d'enfants et l'enseignement primaire et secondaire; 8% pour les centres sportifs, culturels et sociaux .

Article 4.2
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n'est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité


Les autorités locales doivent avoir le droit de prendre des initiatives sur des questions n’étant pas explicitement exclues de leur compétence par la loi[5]. L’article 8 de la loi 139/2015 sur l’autonomie locale dispose que les organes des collectivités locales autonomes peuvent prendre des initiatives d'intérêt public local dans les territoires sous leur juridiction sur toute question, à moins qu'elle ne soit légalement interdite ou confiée exclusivement à un autre organisme. Il apparait donc que les municipalités albanaises, outre les 41 compétences qui leur sont expressément attribuées par la loi 139/2015, sont habilitées à intervenir dans toutes les matières d’intérêt local. Cette clause de compétence générale résiduelle va sans conteste dans le sens de l’autonomie locale mais elle reste de peu d’effet en pratique, compte tenu du nombre et de l’étendue des compétences expressément dévolues aux collectivités.

Article 4.3
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

L'exercice des responsabilités publiques doit, de façon générale, incomber, de préférence, aux autorités les plus proches des citoyens. L'attribution d'une responsabilité à une autre autorité doit tenir compte de l'ampleur et de la nature de la tâche et des exigences d'efficacité et d'économie.

 


Ce paragraphe de la Charte introduit le « principe de subsidiarité », selon lequel les responsabilités publiques doivent être exercées « de préférence » par les autorités ou organismes les plus proches du citoyen. L’article 10 de la loi n°139/2015 dispose que les relations entre les organes des unités d'autonomie locale et les institutions du gouvernement central sont fondées, notamment, sur le principe de subsidiarité. Celui-ci est défini par l’article 2, alinéa 12 comme l'exercice des fonctions et des pouvoirs à un niveau de gouvernance le plus proche des citoyens en tenant compte de l'importance et de la nature des exigences d'efficacité et de rentabilité. Cette définition est directement inspirée de l’article 4 paragraphe 3 de la Charte. L’article 22 de la loi dispose quant à lui que « les collectivités locales autonomes réglementent et administrent l'exercice de leurs fonctions avec plein effet et sans contrôle extérieur, conformément à la Constitution, à la Charte européenne de l'autonomie locale et aux lois en vigueur ». Les 41 compétences exclusives attribuées par cette même loi aux municipalités couvrent un domaine très large qui touche à toutes les responsabilités qui doivent être exercées au plus proche des citoyens.

Article 4.4
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences confiées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et entières. Elles ne peuvent être mises en cause ou limitées par une autre autorité, centrale ou régionale, que dans le cadre de la loi.

 


L’association des municipalités albanaises a souligné auprès des rapporteurs que la ligne de partage entre les compétences des municipalités et les interventions de l’État n’est pas toujours bien établie. Le transfert de nouvelles compétences aux collectivités n’exclut pas que l’État intervienne. La loi 139/2015 prévoit que la création d'un fonds social pour le financement des services se fait en coopération avec le ministère chargé de la protection sociale. Par ailleurs, dans la pratique, on peut citer les ingérences de l’État dans la gestion du littoral depuis 2019 (compétence dont disposaient les collectivités locales). De même, certains investissements sont décidés par l’État, comme la construction des centres de santé alors que la construction, la réhabilitation et l’entretien des bâtiments du service de santé primaire relèvent de la compétence des municipalités depuis la loi 139/2015. Dans de nombreux domaines, la mise en œuvre des compétences locales nécessite encore une action coordonnée avec le gouvernement central. Ainsi les forêts sont gérées par les municipalités mais les services d’inspection sont placés sous l’autorité du ministère de l’environnement. La loi 57/2020 « Sur les forêts » a justement pour objet de préciser le rôle et les responsabilités fonctionnelles de chaque institution responsable des forêts, aux niveaux central et local, lors de la création de l'Agence nationale des forêts.

S’agissant de la production et de l’approvisionnement en eau potable et de la gestion des eaux usées, le gouvernement central, en plus des principales réglementations, détermine également la manière d'exercer la fonction. Par ailleurs, pour l'administration et la réglementation des jardins d'enfants, tous les règlements et une partie principale de l'administration de cette fonction sont toujours assurées par le gouvernement central. S’agissant de la fonction d'administration et de protection des terres agricoles, les municipalités sont toujours dépendantes des conseils régionaux qui ont les principales compétences pour la mise en œuvre de cette fonction.

Dans le domaine de la santé, la décision n ° 405, du 20 mai 2020, « Sur l'approbation de la stratégie pour le développement des services de soins de santé primaires en Albanie 2020-2025 » a été élaborée par le ministère de la Santé et des Affaires sociales et a été approuvée par décision du Conseil du Ministres. En ce qui concerne les tâches dévolues aux gouvernements locaux, la Stratégie apparait assez vague et ne définit précisément ni les obligations ni les ressources financières des communes.

La décision n ° 418, du 27 mai 2020 « Sur l'approbation du document de politiques stratégiques et du plan national de gestion intégrée des déchets, 2020-2035 » prévoit la construction des usines d'incinération de déchets productrices d'énergie à l'initiative du Conseil des ministres ce qui ne parait guère conforme au principe de l'autonomie locale et aux compétences des municipalités définies par la loi 139/2015 sur l’autonomie locale et à la législation environnementale. Il conviendrait donc de clarifier davantage certaines compétences spécifiques et d’harmoniser les législations conférant des compétences spécifiques aux collectivités avec la loi organique139/2015.

Un effort a déjà été entrepris par le ministère de l’Intérieur afin d’aboutir à un cadre juridique fonctionnel clair et aisé d’application au niveau local. En décembre 2020, environ 80% de la législation sur les collectivités locales (loi 139/2015 et lois sectorielles) avait déjà fait l’objet de cette harmonisation. Selon les rapporteurs, cet effort doit être poursuivi.

Les fonctions des communes dans le domaine de la sécurité publique, telles que définies dans la loi organique 139 de 2015, prévoient, entre autres, la responsabilité des municipalités en matière de protection civile contre les catastrophes naturelles ou autres calamités. Les récents phénomènes subis par l’Albanie (tremblement de terre et pandémie) ont révélé des ambiguïtés dans la répartition des rôles et des responsabilités entre les différentes institutions, principalement locales et centrales. La nouvelle loi 45/2019 sur la protection civile et l'atténuation des conséquences du tremblement de terre et de la COVID-19 met l'accent sur le rôle primordial et très important des municipalités dans la réduction des dangers de catastrophes et la protection civile.

Par ailleurs il serait souhaitable d’élaborer et de mettre à jour les normes nationales minimales dans certains domaines prioritaires comme l’enseignement préuniversitaire, les services d’hygiène, le logement, la sécurité publique (police municipale) et la sécurité civile, l’agriculture et le développement rural. L'harmonisation du cadre juridique et réglementaire du service d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées (loi sur le secteur de l'eau) et la fixation de normes minimales de qualité et de sécurité du service d'approvisionnement en eau, y compris le calcul de son coût devraient également être réalisés.

De manière générale, il apparait que de nombreuses nouvelles fonctions de l'autonomie locale ne sont pas encore soutenues par les modifications juridiques nécessaires, ce qui rend difficile l'exercice des fonctions des collectivités locales.

Article 4.5
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

En cas de délégation des pouvoirs par une autorité centrale ou régionale, les collectivités locales doivent jouir, autant qu'il est possible, de la liberté d'adapter leur exercice aux conditions locales.


La délégation des compétences et des tâches gouvernementales peut emprunter différents modes, allant de la législation aux décisions ou réglementations ad hoc du pouvoir central. Habituellement, l’État ou les autorités régionales conservent la propriété de la compétence et transfèrent son exercice ou son application à des entités locales. En même temps, les organismes délégataires conservent le pouvoir de donner des instructions aux organismes locaux sur la manière d’effectuer les tâches déléguées et aussi de superviser leur exécution.

Selon la Recommandation CM/Rec(2007)4 du Comité des Ministres aux États membres sur les services publics locaux et régionaux, la proximité des services publics locaux avec la population est une nécessité fondamentale et les collectivités locales ont un rôle vital à jouer dans la fourniture desdits services. Afin de garantir des services adaptés aux besoins et aux attentes des citoyens, les entités locales devraient bénéficier d’un degré élevé de décentralisation et d’une capacité d’action indépendante au niveau de la prestation. Les autorités déléguées devraient adopter des normes minimales pour la protection des utilisateurs des services délégués et créer les mécanismes nécessaires au contrôle de conformité à celles‑ci. L’article 4.5 de la Charte vise à protéger les collectivités locales en leur qualité de décideurs et à leur conférer un pouvoir discrétionnaire, afin d’éviter qu’elles ne deviennent de simples « exécutantes » aux ordres d’autorités supérieures[6].

En Albanie, aux termes de la loi 139/2015, les fonctions et pouvoirs délégués sont obligatoires ou non obligatoires. Les fonctions et pouvoirs obligatoires sont ceux qui sont prescrits par la loi. Lorsque la loi le permet, les institutions centrales autorisent les communes ou les régions à exercer des fonctions spécifiques, en déterminant, le cas échéant, les procédures de vérification de l'exactitude de leurs performances. Les institutions centrales peuvent autoriser les communes et / ou les régions à exercer une prérogative unique pour une fonction déterminée.

Les communes peuvent se voir déléguer d'autres fonctions et pouvoirs non obligatoires sur la base d'un accord entre une unité d'autonomie locale et l'institution centrale responsable de cette fonction par la loi. En tout état de cause, le gouvernement central doit fournir aux collectivités locales le soutien financier nécessaire à l'exercice des fonctions et pouvoirs délégués.

Pour assurer la mise en œuvre des normes et standards nationaux énoncés dans la législation pertinente, les ministères, en fonction de leurs domaines de responsabilité, surveillent l'activité des organes des collectivités locales autonomes et, en ce qui concerne les fonctions déléguées, ont le droit de les superviser.

En pratique, l’exercice des compétences déléguées se fait sous le contrôle étroit des différents ministères concernés et la marge d’initiative des municipalités est relativement faible.

Article 4.6
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, autant qu'il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décision pour toutes les questions qui les concernent directement.

 


En pratique, il apparait que la consultation des associations des collectivités locales par le gouvernement central est une réalité, même si elle revêt parfois un caractère formel. Un Conseil consultatif composé de représentants du gouvernement central et des collectivités locales et régionales a été créé en décembre 2016, par décision du conseil des ministres.Les associations représentent les collectivités locales et régionales de manière paritaire au sein de ce nouveau dispositif Il représente la principale instance de consultation et de concertation et se réunit plusieurs fois par an. Il permet aux autorités locales de faire valoir leurs propositions et de défendre leurs intérêts et son fonctionnement parait donner satisfaction aux parties concernées. Dans son rapport de 2019, l’Association des municipalités d’Albanie relevait cependant que le Conseil consultatif fonctionnait davantage sur le format d’une Conférence que sous forme d’une instance véritablement participative.

Plus récemment, un Groupe thématique de la décentralisation a été mis en place qui inclut des représentants des autorités régionales et locales ainsi que de la société civile. Par ailleurs, la gestion de la pandémie de Covid19 s’est traduite par une coordination et une coopération étroites avec le gouvernement central aux niveaux logistique, administratif et budgétaire. La consultation entre les autorités locales et centrales est devenue essentielle grâce à des conférences à distance quotidiennes permettant l’échange d’informations et la prise de décisions coordonnées. Plus précisément, des groupes de travail conjoints ont été mis en place pour échanger des informations et se coordonner dans des domaines spécifiques en se réunissant très régulièrement.

La création du Conseil consultatif, en tant que principal forum de consultation sur les nouvelles stratégies susceptibles d'avoir un impact sur la gouvernance locale, est une réalisation importante, qui parait dans l’ensemble appréciée par les parties prenantes et notamment les associations des pouvoirs locaux et régionaux représentées de manière paritaire au sein ce dispositif.

Article 5
Protection des limites territoriales des collectivités locales - Article ratifié

Pour toute modification des limites territoriales locales, les collectivités locales concernées doivent être consultées préalablement, éventuellement par voie de référendum là où la loi le permet.


La réorganisation de la division administrative et territoriale avec ou sans modification des limites doit se faire par une loi spéciale. La proposition de réorganisation d'une ou plusieurs unités d'autonomie locale est soumise à l'Assemblée avec les faits et arguments liés à des raisons économiques, sociales, culturelles, démographiques et administratives sur la nécessité de la réorganisation et ses avantages ; à l’opinion de la population vivant dans les unités d'autonomie locale à réorganiser ; aux cartes administratives et territoriales, qui reflètent également les changements induits par la réorganisation, et aux méthodes de traitement des problèmes des collectivités locales à réorganiser en ce qui concerne leurs obligations financières envers des tiers ou entre elles.

Les conseils municipaux et régionaux touchés par la réorganisation et leurs présidents doivent donner leurs avis officiels et, en cas de désaccord entre les membres du conseil, même les opinions opposées de ces membres. Le Conseil des ministres, lorsqu'il n'est pas l'auteur de la proposition et les autres institutions centrales de l'État, non subordonnées à celui-ci, concernées par une telle réorganisation, donnent leur avis motivé « pour » ou « contre ». Ces avis doivent être donnés dans les 60 jours suivant la réception de la demande du proposant.

L’article 93 de la loi 139/2015 prévoit la mise à jour des limites administratives et territoriales. En ce qui concerne les fusions de communes intervenues en 2014 le processus de consultation dirigé par le Gouvernement a donné lieu à des réunions publiques, des séances de consultation, une audition publique et une enquête nationale. Il est à noter que le referendum local n’est pas prévu par la législation albanaise. Le processus de consultation comprenait la société civile (au total, 13 réunions ont été organisées avec la participation de 1218 participants. Toutes les réunions ont été retransmises en direct sur le portail en ligne de la réforme administrative et territoriale et il y a eu une certaine couverture médiatique). En outre, une Commission parlementaire spéciale pour la réforme administrative et territoriale a tenu 8 auditions publiques avec des représentants du gouvernement local et des associations d'élus locaux, de la société civile, des organisations internationales et des institutions constitutionnelles indépendantes. Au total, 75 participants ont participé à ces audiences. Toutes les réunions ont été diffusées en direct à la télévision. Lors de la deuxième série de réunions consultatives sur les options de fusion approuvées par la Commission, 42 réunions ont eu lieu, avec 1 785 participants. L'instrument d'enquête national avec un échantillon de 16 000 répondants a été utilisé pour obtenir les opinions de la communauté. Cette enquête est classée comme la plus grande enquête nationale jamais menée en Albanie. Il apparait que toutes les unités de gouvernement local ont été consultées sur la nouvelle réforme de l'organisation territoriale et ont donné leur avis sur leur fusion territoriale.

Article 6.1
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Sans préjudice de dispositions plus générales créées par la loi, les collectivités locales doivent pouvoir définir elles mêmes les structures administratives internes dont elles entendent se doter, en vue de les adapter à leurs besoins spécifiques et afin de permettre une gestion efficace.


L’article 113 de la Constitution prévoit que les conseils communaux, municipaux et régionaux sont compétents pour établir les règles pour leur organisation et leur fonctionnement conformément à la loi. L’article 9 de la loi 139/2015 sur l’autonomie locale dispose que les municipalités peuvent établir des structures administratives pour exercer les fonctions et compétences qui leur ont été dévolues. Elles peuvent ainsi mettre en place des comités, conseils ou commissions pour exécuter des fonctions spécifiques lorsque cela est nécessaire, en respectant la loi sur l'égalité des sexes.

Article 6.2
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Le statut du personnel des collectivités locales doit permettre un recrutement de qualité, fondé sur les principes du mérite et de la compétence; à cette fin, il doit réunir des conditions adéquates de formation, de rémunération et de perspectives de carrière.


La nouvelle loi 152/2013 sur la fonction publique étend son champ d'application à l'administration communale. Les capacités des ressources humaines se sont améliorées au fil des ans, mais demeurent problématiques. En 2020, selon le système financier en ligne du Gouvernement (FISG), on dénombrait 34 047 employés pour les 61 municipalités, ce qui représente une augmentation de 901 agents par rapport à 2019. 40 des 61 municipalités ont augmenté le nombre de leurs agents, en particulier la municipalité de Tirana (+488 employés), celle de Pogradec (+130 employés) et celle de Durrës (+81). D'autres municipalités ont en revanche connu une diminution de leurs effectifs, en particulier la municipalité de Dibër (-63 employés) ou celle de Lezhë (-52 employés).

Le personnel administratif le plus qualifié est principalement concentré au niveau central et dans les grandes villes, tandis que les municipalités situées dans les zones rurales connaissent des difficultés de recrutement. Il est indiqué dans la Stratégie transversale pour la décentralisation et la gouvernance locale que : « La capacité limitée à concevoir et à mettre en œuvre des stratégies intégrées de développement local et des plans de développement territorial locaux, à élaborer un programme budgétaire local à moyen terme, la capacité à gérer la complexité réglementaire et la durabilité des structures de formation ont été quelques-uns des principaux défis pour le fonctionnement de l'administration gouvernementale locale ».

Le système salarial applicable aux agents des collectivités locales est régi par un cadre juridique spécifique et il est basé sur une un classement en quatre groupes des municipalités en fonction du nombre de résidents. Des progrès restent à faire, notamment en ce qui concerne la rémunération appropriée des employés des petites et moyennes municipalités, qui reçoivent des salaires inférieurs à ceux des grandes municipalités. Selon l'examen à mi-parcours et les rapports de suivi annuels de la Stratégie nationale transversale pour la décentralisation et la gouvernance locale, la révision de la structure salariale au niveau des collectivités locales, en particulier pour les petites et moyennes municipalités, reste une priorité pour le gouvernement albanais dans les années à venir afin d'améliorer les chances de retenir des employés qualifiés. Enfin, le recrutement des agents devrait se faire indépendamment de toute considération et de toute influence politique.

Article 7.1
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Le statut des élus locaux doit assurer le libre exercice de leur mandat.


Le mandat du maire doit être confirmé par le tribunal de district (chambre civile) dans le ressort duquel la commune concernée est comprise, dans un délai de 20 jours à compter de la date de l'annonce des résultats de l'élection du maire. La nullité du mandat de maire est déclarée lorsque les conditions de l'article 45 de la Constitution et des dispositions pertinentes du Code électoral de la République d'Albanie ne sont pas remplies (condamnation à une peine de prison). Le mandat de maire prend fin si celui-ci refuse de prêter serment ; démissionne ; n’est plus résident permanent de la commune dans laquelle il a été élu ; est révoqué  par le Conseil des ministres en vertu de l'article 62 de la loi 139/2015 (s’ils ont commis de graves violations de la Constitution ou des lois ; s’ils sont reconnus coupables d'une infraction pénale par une décision judiciaire définitive ; si le conseil municipal propose de les révoquer pour absence de service fait pendant une période continue de 3 mois.) ; est candidat pour devenir membre du Parlement ; est déclaré inéligible par décision judiciaire définitive ; décède. En cas de résiliation prématurée du mandat de maire, des élections partielles pour un nouveau maire sont organisées, conformément aux dispositions du Code électoral de la République d'Albanie et les fonctions de maire sont exercées par le maire adjoint en attendant l'élection d'un nouveau maire.

S’agissant des conseillers municipaux, il existe un système de vérification des mandats. L’article 49 de la loi n° 139/ 2015 dispose en effet que le mandat de conseillers est confirmé et peut être révoqué par le conseil municipal à la majorité des voix du nombre total des membres du conseil. Les conditions auxquelles le mandat de conseiller peut prendre fin prématurément sont également prévus dans la loi.

La dissolution du conseil municipal avant la date limite peut intervenir lorsque le conseil municipal ne se réunit pas pendant une période continue de trois mois à compter de sa dernière réunion, le préfet convoque sa réunion au plus tard vingt jours après. Si, après avoir été convoqué par le préfet, le conseil municipal ne se réunit pas, il est dissous avant le délai prévu par décision du conseil des ministres. Le conseil municipal peut également être dissous à la suite d'une réorganisation due aux changements des limites de la municipalité.

Il existe une marge d’appréciation concernant les « graves violations de la Constitution ou de la loi » qui peuvent motiver la révocation d’un maire ou la dissolution d’un conseil municipal, très rares en pratique. Les tribunaux qui peuvent être saisis de telle décisions peuvent apprécier leur légalité.

Article 7.3
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Les fonctions et activités incompatibles avec le mandat d'élu local ne peuvent être fixées que par la loi ou par des principes juridiques fondamentaux.


Les restrictions à l’exercice d’un mandat électif doivent être aussi limitées que possible et définies dans la législation nationale, ce qui signifie qu’elles s’appliquent à tous les niveaux d’autorité publique. Elles doivent porter essentiellement sur les conflits d’intérêts potentiels ou sur une activité qui empêche l’élu local d’exercer ses fonctions pour la collectivité locale d’une manière professionnelle.

En Albanie, l’article 47 de la loi 139/2015, prévoit les cas où la fonction de conseiller municipal peut être déclarée incompatible avec certains mandats.

Article 7.2
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Il doit permettre la compensation financière adéquate des frais entraînés par l'exercice du mandat ainsi que, le cas échéant, la compensation financière des gains perdus ou une rémunération du travail accompli et une couverture sociale correspondante.


L’article 51 de la loi 139/ 2015 dispose que les conseillers s'acquittent de leurs fonctions moyennant une indemnité mensuelle pouvant atteindre 10 % du salaire mensuel du maire de la commune concernée. Une décision du Conseil des ministres définit le montant minimum et maximum du salaire mensuel du maire et du maire adjoint, qui varie selon trois différents groupes de municipalités. L'employeur est tenu de permettre au conseiller de s'absenter du travail pour assister aux réunions du conseil municipal ou aux réunions de ses comités et aux activités organisées par le conseil. À leur demande, les conseillers doivent être informés et recevoir toute documentation relative à la municipalité de la part des maires. Un conseiller a droit à une formation professionnelle, selon un programme approuvé par le conseil municipal.

Article 8.1
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif sur les collectivités locales ne peut être exercé que selon les formes et dans les cas prévus par la Constitution ou par la loi.


Le contrôle administratif et financier exercé sur les collectivités locales est précisément défini par l’article 13 de la loi 139/2015 sur l’autonomie locale.

Pour assurer la mise en œuvre des normes et standards nationaux énoncés dans la législation pertinente, les ministères, en fonction de leurs domaines de responsabilité, surveillent l'activité des organes des collectivités locales autonomes et, en ce qui concerne les fonctions déléguées ont le droit de les superviser.

Les décisions, arrêtés et ordonnances à caractère normatif émis par les organes des collectivités locales sont soumis au contrôle de légalité du préfet dans un délai de 10 jours à compter de la date de leur promulgation. Le préfet, représentant local désigné du gouvernement central, dispose d'un pouvoir de contrôle étendu sur les actes et les décisions des collectivités. Le préfet est tenu de se prononcer sur la légalité de l’acte dans un délai de 10 jours à compter de la date de son enregistrement.

Le contrôle de légalité exercé par le préfet peut conduire au rejet de l’acte de la collectivité, cette dernière pouvant déférer la décision du préfet au tribunal administratif.

Les collectivités locales autonomes sont soumises à un audit externe des organes du gouvernement central en ce qui concerne l'utilisation des fonds conditionnels et / ou délégués fournis par le budget de l'État et / ou des fonds d'aide étrangère, qui leur sont alloués conformément aux accords signés par le gouvernement central.

Les collectivités locales autonomes sont soumises au contrôle de l’Institution du contrôle supérieur de l’État conformément à la législation en vigueur. Selon l'article 163 de la Constitution, l’Institution du Contrôle supérieur de l'État est notamment chargée de contrôler l'utilisation des fonds de l'État par les organes du gouvernement central et local. La loi 154/2014 a précisé les fonctions de l’Institution du contrôle supérieur de l’État. Elle réalise une vingtaine d’audits par an qui portent sur la régularité de l’emploi des fonds mais aussi sur la performance et la qualité de la gestion locale. Elle peut émettre des recommandations au cas par cas qui sont très largement suivies d’effet (362 recommandations émises en 2018, 357 acceptées). Chaque année, l’institution fait rapport au Parlement sur l'exécution du budget public par les collectivités locales.

Article 8.2
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif des actes des collectivités locales ne doit normalement viser qu'à assurer le respect de la légalité et des principes constitutionnels. Le contrôle administratif peut, toutefois, comprendre un contrôle de l'opportunité exercé par des autorités de niveau supérieur en ce qui concerne les tâches dont l'exécution est déléguée aux collectivités locales.


Selon la règle générale établie par la Charte, le contrôle ne doit « normalement » viser qu’à assurer le respect de la légalité et des principes constitutionnels. La Charte affiche ainsi une prédilection globale pour le contrôle de légalité par rapport au contrôle d’opportunité, seul le premier étant généralement conforme à ses dispositions. Cela étant, le contrôle d’opportunité n’est pas interdit par la Charte, mais il est sévèrement restreint, car réputé antinomique avec la notion même d’autonomie locale. Le contrôle administratif de l’opportunité d’un acte doit par conséquent être limité aux tâches que les autorités supérieures (les organes de contrôle) ont déléguées aux collectivités locales[10].

En Albanie, en tant que tel, le contrôle des collectivités locales par le gouvernement central vise à assurer le respect de la loi et exclut tout contrôle de l'opportunité des actions qui relèvent des compétences propres des autorités locales. Aux termes de la loi d’octobre 2016 sur les préfets de région, les relations entre le préfet de région et les collectivités locales sont basées sur le principe de la concertation et de la coopération pour la solution des problèmes communs.

Dans la pratique, le préfet a pour mission de veiller à ce que les lignes politiques du pouvoir central soient suivies au niveau local. Cela a pu susciter des polémiques, en raison des pratiques partisanes qu’un tel système peut entraîner à l’échelon local et parce que cela permet au pouvoir central d’exercer un contrôle direct sur les pouvoirs locaux et régionaux. La loi de 2016 a renforcé le rôle du préfet dans le contrôle de la mise en œuvre de la législation et des fonctions déléguées par les collectivités locales. Ainsi, le préfet est expressément chargé de vérifier la réalisation des compétences et responsabilités déléguées par le gouvernement central et l'utilisation des fonds prévus pour ces fonctions, selon les règles déterminées par décision du Conseil des ministres. Dans le cas où des violations de la loi seraient constatées lors du contrôle, le préfet de région en informe le ministre chargé des fonctions déléguées, ainsi que le Premier ministre.

Au niveau régional, le préfet suit les affaires sociales, économiques et politiques de la région. Tous les documents d’orientation et les budgets sont soumis au préfet, qui peut conserver ces documents pendant une période de dix jours afin d’en vérifier la légalité.

Article 8.3
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Le contrôle administratif des collectivités locales doit être exercé dans le respect d'une proportionnalité entre l'ampleur de l'intervention de l'autorité de contrôle et l'importance des intérêts qu'elle entend préserver.


L’intervention de l’autorité de contrôle doit conserver un certain rapport avec l’importance des intérêts qu’elle entend protéger. Dans cet esprit, en 2019, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a recommandé aux gouvernements des États membres d’adopter des mesures appropriées pour « mettre en place un cadre juridique, institutionnel et réglementaire adéquat pour le contrôle des activités des collectivités locales qui soit proportionné, en droit et en pratique, à l’importance des intérêts qu’il entend préserver » (Recommandation CM/Rec(2019)3[11] du Comité des Ministres aux États membres sur le contrôle des actes des collectivités locales). Par conséquent, en vertu du principe de proportionnalité, l’organisme de contrôle ne devrait intervenir que dans la mesure nécessaire, en tenant compte de la pertinence de l’intérêt public en jeu ou de la gravité de la violation prétendument commise par la collectivité locale.

En Albanie, le contrôle administratif des collectivités locales parait être exercé dans le respect d’une proportionnalité entre l’ampleur de l’intervention de l’autorité de contrôle et l’importance des intérêts qu’elle entend préserver. Les actes des collectivités locales ne sont pas immédiatement exécutoires. Ils doivent faire l’objet d’une approbation préalable du préfet. Le contrôle de légalité exercé par le préfet peut conduire au rejet de l’acte de la collectivité, mais le préfet peut ouvrir une négociation avec la collectivité afin de rectifier la décision initiale, ce qu’il fait le plus souvent dans la pratique. En effet, dans les cas où il constate une illégalité, le préfet peut renvoyer l’acte à l'organe compétent de l'unité d'autonomie locale, en faisant valoir les violations constatées. Dans ce cas, la collectivité procède à un réexamen de l’acte. En cas d’illégalité à nouveau constatée de l'acte révisé, le préfet s'adresse au tribunal administratif pour demander la déclaration de nullité de cet acte. Dans les cas où il constate une illégalité et estime que le retour de l'acte par l'organe de l'unité d'autonomie locale ne sera pas fructueux, le préfet peut demander l’annulation de l'acte directement devant le tribunal administratif et il en informe la collectivité. Dans la pratique, il peut exister des cas de coopération difficile entre les municipalités et le préfet qui conduit à un nombre élevé de restitution d'actes pour réexamen par le préfet.

La collectivité, de son côté peut déférer la décision de rejet du préfet au tribunal administratif qui appréciera si le rejet est justifié. En pratique, le ministère de l’Intérieur peut intervenir en cas de difficulté et réexaminer la légalité des actes après avis du ministère de la Justice.

Au cours de leurs réunions avec différents interlocuteurs, les rapporteurs n’ont eu connaissance d’aucune plainte concernant un respect insuffisant de l’article 8, paragraphe 3 de la Charte. L’Association des municipalités albanaises considère que le préfet n'interfère pas avec l'autorité et les droits des autorités locales dans la prise de décision et qu’il n’exerce aucun pouvoir hiérarchique sur les collectivités locales.

Article 9.8
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Afin de financer leurs dépenses d'investissement, les collectivités locales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché national des capitaux.


Les collectivités locales ont le droit d'emprunter à court et à long terme, conformément à la loi régissant l’autonomie locale, les emprunts locaux et la gestion du système budgétaire. Le ministère des Finances peut exiger un audit externe indépendant des comptes de la collectivité locale avant l'approbation d’un emprunt à long terme (art.31 de la loi 68/2017). Un certain pourcentage du plafond annuel d'emprunt approuvé par la loi de finances annuelle est réservé aux collectivités locales, conformément à la politique et à la discipline fiscale poursuivies par l'administration centrale. L'accès au marché de la dette extérieure est réglementé en collaboration avec le ministère des Finances.

Toute réglementation ou restriction imposée par le gouvernement central aux emprunts des collectivités locales limitant leur capacité d'emprunter est temporaire et ne peut être prolongée au-delà de l'exercice au cours duquel elles sont imposées, à moins que ces mesures ne soient approuvées par l’Assemblée (art.39 de la loi 139 /2015). Les données publiées par le ministère des Finances et de l'Économie montrent qu’à la fin de 2020, la dette totale des collectivités locales atteignait 6,930 milliards ALL, marquant une baisse significative de 1,239 milliard ALL par rapport à l'année précédente. La dette la plus élevée a été accumulée par trois municipalités, à savoir Tirana (761,8 millions), Kavajë (727,8 millions) et Vorë (702,6 millions).

Article 9.7
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L'octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence.


Le cadre juridique albanais définit quatre types de transferts : les impôts partagés, les transferts inconditionnels, les transferts spécifiques pour les fonctions nouvellement transférées ; les transferts conditionnels pour les fonctions déléguées et les subventions d'investissement conditionnelles et compétitives du Fonds de développement régional (FDR). Les transferts sont alloués aux collectivités locales sur la base des coûts historiques précédemment déclarés par les ministères respectifs. Le transfert inconditionnel du budget de l'État (art.23 de la loi 68/2017) est accordé aux collectivités locales autonomes pour financer leurs fonctions et compétences telles que définies par la loi. Son utilisation est totalement libre. La loi de 2017 sur l’autonomie financière (article 22) pose en effet comme principe que les collectivités locales jouissent d'une totale autonomie dans l'utilisation des transferts inconditionnels et des revenus provenant des impôts partagés.  Le montant annuel de la dotation inconditionnelle à allouer aux collectivités locales ne doit pas être inférieur à 1% du produit intérieur brut et dans tous les cas, il ne peut être inférieur à la somme allouée l'année budgétaire précédente.

En 2019, les transferts inconditionnels représentent 1% du PIB ou 17,5 milliards de lek, soit une augmentation de 6% ou environ 1 milliard de lek par rapport à 2018 et 42% ou 5,2 milliards de plus par rapport à 2015, selon le ministère des finances. Le transfert conditionnel est utilisé aux fins et de la manière déterminées par l'entité qui effectue le transfert.

Comme les fonctions propres doivent être financées par les recettes générales et non par des subventions conditionnelles dont les conditions sont fixées par le gouvernement national, la loi a mis en place une période de transition de trois ans pendant laquelle les municipalités reçoivent des subventions conditionnelles - transferts spécifiques - pour les financer. Cette période de transition s’est terminée en 2019, sans pour autant que les objectifs fixés aient été atteints. Il était prévu qu'à partir de 2019, les municipalités aient non seulement un plus grand contrôle de gestion sur ces fonctions nouvellement décentralisées, mais qu'elles commencent à les financer grâce à une combinaison des taxes et des redevances locales, et à la subvention inconditionnelle reçue du gouvernement.

Selon les rapporteurs, un relèvement de 1% à 2% du seuil du PIB fixé pour les transferts inconditionnels, souhaité par les associations représentatives des municipalités, devrait constituer un objectif à court terme. Il serait souhaitable d’améliorer la prévisibilité, la stabilité et l'adéquation du système de transfert intergouvernemental.

A terme, les transferts conditionnels seront accordés uniquement pour financer des projets spécifiques considérés d'intérêt local, régional ou national, où une coopération avec les collectivités locales est nécessaire, ainsi que les fonctions déléguées. L'organisme du gouvernement central proposant la délégation d'une fonction et le transfert conditionnel qui l'accompagne doit préalablement consulter le Conseil consultatif entre le gouvernement central et les collectivités locales (art. 27 de la loi n°68/27).

Article 9.6
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, d'une manière appropriée, sur les modalités de l'attribution à celles ci des ressources redistribuées.


Un Conseil consultatif des autorités centrales et locales a été mis en place en janvier 2017 afin d'institutionnaliser le processus de consultation entre le gouvernement central et les collectivités locales, en tant que principal forum de consultation sur les projets de loi, les projets de décisions du Conseil des ministres, les politiques et les stratégies de projet qui réglementent ou ont un impact direct sur l'exercice des droits et obligations des collectivités locales. Les associations représentent les collectivités locales et régionales de manière paritaire au sein de ce nouveau dispositif. La loi sur les finances locales a été au cœur des discussions des premières réunion du Conseil consultatif. La plupart des propositions présentées par les associations ont été prises en compte dans le texte final de la loi, entrée en vigueur en mai 2017. Les activités récentes du Conseil consultatif ont permis aux autorités locales et leurs associations de débattre des orientations budgétaires, de la mise en œuvre de la stratégie nationale de décentralisation, ou encore des mesures envisagées pour la protection de l’environnement.

L’Association des municipalités regrette cependant que l'activité du Conseil se concentre principalement sur la présentation de nombreux actes infra-juridiques et sur des questions techniques plutôt que de débattre sur les questions stratégiques relatives aux compétences et aux finances.

Article 9.5
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

La protection des collectivités locales financièrement plus faibles appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou des mesures équivalentes destinées à corriger les effets de la répartition inégale des sources potentielles de financement ainsi que des charges qui leur incombent. De telles procédures ou mesures ne doivent pas réduire la liberté d'option des collectivités locales dans leur propre domaine de responsabilité.


L’article 24 de la loi de 2017 prévoit que le transfert inconditionnel aux collectivités locales est réparti selon la formule publiée et explicitée dans les annexes de la loi de finances annuelle. Cette formule prend notamment en compte les critères suivants : a) Population des résidents, telle que mesurée par le dernier recensement et corrigée avec les données du registre de l'état civil, suivant un coefficient publié dans les annexes de la loi de finances annuelle. Jusqu'à 80% du total sont alloués selon ce critère ; b) Densité de la population, reflétant les différences de coûts de prestation des services entre les unités d'autonomie locale. Jusqu'à 15% du total seront alloués selon ce critère ; c) Nombre d'élèves dans le système d'enseignement pré-universitaire. Pas moins de 5% du total sont alloués selon ce critère.

La péréquation financière est effectuée dans le cadre de la subvention inconditionnelle et est fondée sur le partage des recettes fiscales. Une fois le transfert inconditionnel calculé, une série de calculs distincts est effectuée pour les collectivités locales dont les recettes totales par habitant provenant des taxes partagées existantes sont inférieures à 75 % de la moyenne nationale et supérieures de 110 % à la moyenne nationale.

La péréquation fiscale est basée sur :

a. La capacité fiscale de chaque municipalité, qui est calculée comme le total des revenus réels des impôts partagés de chaque municipalité perçus / reçus l'année précédente ;

b. Le seuil de la péréquation, qui est calculé comme le rapport entre les recettes par habitant provenant des impôts partagés de la commune à la moyenne nationale des mêmes impôts, au-dessus ou au-dessous duquel, la municipalité bénéficie ou contribue au fonds de péréquation de la subvention inconditionnelle.

c. Le coefficient de péréquation qui est calculé comme le montant que les municipalités par les recettes par habitant provenant des impôts partagés au- dessus ou au- dessous du seuil de péréquation devrait donner ou recevoir du fonds de péréquation.

d. Le fonds d'indemnisation résultant, nécessaire pour assurer la péréquation fiscale entre les municipalités et qui est calculé comme le montant des fonds nécessaires pour faire en sorte que toutes les municipalités arrivent au seuil d'égalisation choisi.

Les collectivités locales autonomes dont la capacité fiscale est inférieure au seuil de péréquation reçoivent une compensation selon le coefficient de péréquation préétabli et le fonds de péréquation disponible résultant des contributions des communes dont la capacité fiscale est supérieure au seuil.

S’agissant des régions, il existe un instrument de péréquation verticale, le Fond des régions (Fondi i Rajoneve) qui a remplacé le programme centralisé de subventions. Cette structure est placée auprès du Premier ministre.

Article 9.3
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d'impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.


Ce paragraphe traite des impôts et redevances locaux, lesquels sont généralement considérés comme des ressources de droit public de l’administration publique. Le pouvoir de prélèvement fiscal est une preuve directe de l’autonomie financière des collectivités locales[12].

La fiscalité locale constitue la fondation du financement des services locaux par les recettes locales. Il s’agit donc d’un indicateur critique pour mesurer l’autonomie locale, de même que le ratio des revenus propres ou la proportion des transferts de l’administration centrale dans le budget local total. Ainsi, les collectivités locales jouissant de la plus grande autonomie financière sont celles dont le budget comporte une grande part de recettes locales, la plus grande autonomie financière revenant aux collectivités locales ayant une plus grande part des recettes locales, ce qui leur confère la capacité de financer les tâches obligatoires.

La Charte ne fixe pas un ratio uniforme entre les impôts locaux et les ressources propres des collectivités locales, mais, en tout état de cause, elle prévoit qu’une partie « au moins » desdites ressources doit provenir de redevances et d’impôts locaux. Cette partie doit être suffisamment importante pour assurer la plus grande indépendance financière possible aux collectivités locales. AÌ€ la lumieÌ€re de l’article 9.3, un impoÌ‚t ne peut eÌ‚tre qualifié de purement local que si la collectivité concernée a le pouvoir d’en fixer le taux « dans les limites de la loi ». Par conséquent, la législation fiscale applicable peut déterminer une « fourchette » de taux d’imposition, dans le cadre de laquelle la collectivité locale peut déterminer librement le taux réel de l’impoÌ‚t. En outre, les collectivités locales doivent également jouir du pouvoir d’approuver des reÌ€glements internes réglant les détails techniques et opérationnels de la perception de l’impoÌ‚t (types de taux, déductions, programmes d’alleÌ€gements fiscaux, etc.), afin que les dispositions générales de la loi puissent eÌ‚tre adaptées aux circonstances et besoins locaux.

L’article 11 de la loi n° 68/2017 sur les finances des collectivités locales régit les revenus propres des collectivités. Elle énumère les différentes taxes locales à savoir :

a. Taxe sur la propriété immobilière, qui comprend une taxe sur les bâtiments, une taxe sur les terres agricoles et une taxe sur les terrains urbains, ainsi que les transactions effectuées sur ces derniers ;

b. Taxe sur l'impact des infrastructures des nouveaux bâtiments ;

c. Taxe d'hébergement hôtelier ;

d. Taxe sur les panneaux publicitaires ;

e. Impôts temporaires établis conformément à la loi ;

f. Impôts locaux sur l'activité économique des petites entreprises ;

g. Impôts sur le revenu personnel, les impôts sur les revenus provenant des dons, héritages, testaments et loteries locales ;

h. Autres impôts définis par la loi.

Les sources de revenus propres les plus importantes sont : la taxe foncière récurrente, la taxe sur l'impact des nouvelles constructions sur les infrastructures (IIT) et les redevances et frais locaux pour les services locaux. Jusqu'à récemment, la taxe sur les petites entreprises (SBT) était également une source de revenus importante pour les collectivités locales. Depuis 2006, l'assiette de la SBT a été réduite à plusieurs reprises et, dans la période 2013-2015, elle a été transformée en pratique en un impôt partagé qui est maintenant perçu par le gouvernement national et dont la grande majorité des petites entreprises sont exemptées. Le rendement de la SBT en 2017 n'est que de 10 % de ce que les collectivités locales ont perçues par elles-mêmes en 2008.

L’article 14 de la loi de 2017 prévoit par ailleurs que les collectivités locales peuvent fixer des redevances pour un service fourni ou un droit accordé à des personnes physiques ou morales. Les collectivités locales peuvent tirer des recettes de certaines redevances telles qu’issues de l’occupation de l’espace public ou la collecte et l’élimination des déchets par exemple.

Les gouvernements locaux peuvent également tirer des revenus de la location de propriétés municipales, de la vente de biens immobiliers locaux conformément à la législation applicable, d’activités économiques. Les taux des taxes locales restent encadrés par les lois nationales qui établissent un plancher et un plafond pour chacune d’entre elles, les conseils municipaux restant libres de moduler les taxes dans les limites prévues par la loi.  Le niveau des redevances locales est déterminé par le conseil de la municipalité, sauf indication contraire par des lois spécifiques. Il vise à couvrir les coûts et est directement proportionnel à la consommation des particuliers.

D’après l’Observatoire mondial des finances et des investissements des collectivités territoriales (SNG WOFI)[13], en 2016, les collectivités locales albanaises restaient fortement dépendantes des subventions fiscales, qui représentaient 76 % de leurs recettes totales en 2016, tandis que les recettes fiscales - y compris les impôts partagés et les impôts propres - ne représentaient qu'environ 16 %. Ces ratios contrastaient avec les moyennes de l'UE (44 % pour les subventions et les aides, et 41 % pour les recettes fiscales) et constituaient une indication de forts déséquilibres verticaux fiscaux.

Après l’adoption de la nouvelle loi sur finances en 2017, selon les données fournies par NALAS[14] en 2019, les revenus propres représentaient 42 % du budget local total (la moyenne pour les Balkans occidentaux est de 39%) tandis que les impôts partagés n’en représentaient que 3% (la moyenne pour les Balkans occidentaux est de 14%). La proportion des transferts de l’administration centrale dans le budget local total était de 56%. En 2020, l’impact de la crise sanitaire s’est traduit par une baisse de 4,9% des recettes des impôts locaux et de 5,3% des ressources propres alors que dans le même teps les transferts de l’État augmentaient de 3,6%.

Bien qu’une partie de ressources propres provienne de redevances et d’impôts locaux, il semble aux rapporteurs que cette part des ressources propres n’est pas encore suffisante pour assurer l’indépendance financière aux collectivités locales. Les rapporteurs considèrent que la part des impôts partagés avec l’État pourrait être augmentée de manière significative.

En pratique la perception de certaines taxes peut également poser problème. Il en va ainsi notamment de la perception de la taxe immobilière, qui doit devenir un élément central du système fiscal local. Faute d’informations récentes relatives aux données cadastrales fournies par l’État pour établir cette taxe, les municipalités ne sont pas en mesure d’établir les bases de cette imposition à partir de données fiables, ce qui a pour conséquence des pertes de recettes. Pour remédier à cette situation dommageable pour les finances locales, l’État a entrepris une numérisation des biens immobiliers pour permettre le calcul de cette taxe dont la base est la valeur du marché des biens assujettis.  L’État doit fournir aux municipalités des informations fiables concernant le cadastre pour leur permettre d’établir les bases de la taxe immobilière qui constitue l’élément central du système de fiscalité locale.

Article 9.2
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi.


Parmi les principes de base des finances de l'autonomie locale mentionnés par la loi 139/2015 sur l’autonomie locale, il convient de citer celui selon lequel : « Les fonctions et pouvoirs délégués aux collectivités locales autonomes sont accompagnés à chaque fois des moyens financiers nécessaires à leur réalisation ».

La réforme territoriale et la loi sur l’autonomie financière locale ont permis un accroissement notable des budgets locaux. Ainsi, le budget de la ville de Tirana est passé de 35 millions d'euros à 180 millions d'euros depuis l'entrée en vigueur de la réforme territoriale. Ces réformes ont également rendu possible la décentralisation fiscale au niveau des communes, permettant ainsi d’élaborer des budgets dont les dépenses sont mieux à même de satisfaire les besoins des administrés à travers les investissements et les services publics locaux. Dès la première année d’application de la réforme territoriale, les revenus des impôts et taxes locaux ont augmenté d'environ 3,7 milliards de ALL soit 28%. Les principaux contributeurs à la croissance des revenus locaux ont été la taxe foncière (+ 19%), les services d'élimination des déchets, l'éclairage public et les espaces verts (+ 58%), les frais administratifs (+ 27%) et la taxe d'impact sur les infrastructures (+ 94%). Les changements dans le cadre juridique de la taxe sur l'occupation de l'espace public, et de la taxe de séjour hôtelier ont conduit à une augmentation des revenus locaux d'environ 500 millions de ALL en 2016.

Les investissements publics financés par les communes elles-mêmes ont augmenté de 26% soit 2,2 milliards de ALL par rapport à 2015. Il existe cependant des différences importantes dans la performance individuelle des communes en termes d'investissements : dans 18 des 61 nouvelles communes, les dépenses d'investissement sont passées de -2 à - 60% en termes annuels, tandis que dans 18 autres municipalités, ils ont augmenté de plus de 100% par rapport à 2015.

Cependant, compte tenu des nombreuses compétences qui ont été transférées aux municipalités en 2015 et du rôle qu’elles jouent en matière de développement économique et social, il apparait que les moyens financiers dont  elles disposent, y compris les plus grandes, sont encore insuffisants pour couvrir l’intégralité de leurs besoins et pour leur permettre d’exercer dans les meilleures conditions les compétences qui leur sont dévolues, comme cela ressort du dernier rapport (2019/2020) de l’Institution du contrôle supérieur de l’État. L'évaluation de la situation financière des communes menée en 2019 par le Projet « Finances Locales », soutenu par le gouvernement suisse, fait apparaitre quant à elle qu’une municipalité appartenait à la catégorie des collectivités rencontrant des « difficultés financières graves », (avec un stock d'arriérés égal à 85,2% des dépenses approuvées), neuf municipalités connaissant des « difficultés financières », 12 autres des « problèmes financiers » et 37 municipalités n’en rencontrant aucun.

Par ailleurs, selon la législation albanaise sur l'autonomie locale, le principe de l'adéquation financière des fonctions propres et déléguées de l'autonomie locale est régi par le critère des ressources financières proportionnelles au coût de l'exercice des fonctions. Selon la loi 139/2015, l'adéquation des ressources financières est déterminée par le niveau des normes légales requises pour l'exercice des fonctions d'autonomie locale. Cette définition n'est pas pleinement reflétée dans la loi 68/2017 sur l’autonomie financière, qui prévoit que l'adéquation des ressources financières est déterminée par le coût historique de l'exercice des fonctions d'autonomie locale par les différents ministères, pour le niveau de normes légales historiquement atteint, réduisant ainsi le montant adéquat devant être financé par le gouvernement central. Ainsi, la loi 68/2017 ne dispose pas que le niveau du transfert inconditionnel pour les fonctions propres de l'autonomie locale doit être proportionnel au coût d’exercice des fonctions, ni dépendant des normes juridiques de leur exercice.

Il en résulte que le coût n'est pas déterminé par rapport aux normes légales de leur exercice mais comme la moyenne des dépenses de l'administration centrale des trois dernières années.  Par conséquent, le montant du transfert pour l’exercice des compétences propres n'est pas calculé par rapport à leur coût réel dans la mesure où les coûts historiques sont restés la seule base utilisée par le ministère des Finances et de l'Économie pour estimer les coûts des compétences propres des collectivités locales. C’est sur les mêmes bases que sont calculés les montants des transferts liés à l’exercice des compétences déléguées comme l’administration et la protection des terres agricoles. Une réforme a été engagée avec le budget 2019 pour financer la fonction d’administration du système d’éducation préscolaire et les jardins d'enfants sur la base d'une nouvelle norme à savoir le nombre d'enfants accueillis par ces services. Il serait souhaitable qu'une définition des règles et normes nationales pour l’exercice des compétences locales puisse être établie pour les autres fonctions.

Par ailleurs, la décentralisation symétrique des fonctions s'est heurtée à la répartition inégale sur le territoire des ressources que les ministères utilisaient auparavant pour exercer la fonction concernée.

Entre 2016 et 2018, le gouvernement a fourni un soutien financier et matériel supplémentaire, en particulier pour les écoles maternelles, la protection contre les incendies et l'irrigation et le drainage, bien qu'il subsiste des différences substantielles dans l'équipement en ressources. Grâce au système de budgétisation à mi-parcours des fonctions de l'autonomie locale, les principales informations sur le coût de l'exercice des fonctions proviennent des évaluations de l'administration des collectivités locale. Dans ce contexte, il est toujours nécessaire d'aligner pleinement les compétences et les ressources financières, afin d'effectuer le transfert inconditionnel pour les fonctions propres de l'autonomie locale en fonction du coût de l'exercice des fonctions des gouvernements locaux.

Il serait également souhaitable d’améliorer la prévisibilité, la stabilité et l'adéquation du système de transfert intergouvernemental. Plus précisément, il conviendrait de proscrire les modifications juridiques décidées par le gouvernement central, intervenant en cours d’année budgétaire, qui affectent les finances des municipalités. En pratique, il ne semble y avoir aucun cas de cette nature à ce jour.

Il convient enfin de souligner que le tremblement de terre de 2019 et la crise sanitaire liée au Covid19 ont généré d’importantes dépenses supplémentaires et imprévues à la charge des collectivités, ainsi qu’une diminution des ressources fiscales, qui n’ont été que très partiellement compensées par l’État (voir infra).

Article 9.1
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l'exercice de leurs compétences.


L'autonomie financière des collectivités territoriales en Albanie est garantie par la Constitution et la nouvelle loi 68/2017 sur le financement de l'autonomie locale. Celle-ci indique que la décentralisation fiscale reste un élément essentiel du programme de réforme. Elle vise à donner aux collectivités territoriales une plus grande autonomie financière pour faire face aux fonctions qui leur sont dévolues. Elle pose comme principe que les politiques fiscales nationales garantissent la suffisance financière des collectivités locales et reposent sur le principe de la diversification des sources de revenus. Elle prévoit dans son article 10 queles collectivités locales autonomes seront financées par les taxes et redevances locales et autres recettes locales, les fonds prélevés sur le budget de l'État, les fonds provenant des impôts et charges nationaux partagés, des emprunts locaux, des dons et de toute autre source locale définie par la loi.

Les réformes engagées ont permis de manière générale une augmentation de l'autonomie fiscale et financière des municipalités, mais leur situation est fortement contrastée. Les municipalités contrôlent 75% des sources de financement, tandis que le gouvernement central contrôle 25% du total des fonds dépensés au niveau local par le biais de transferts conditionnels. A côté des transferts conditionnels, il existe également des transferts inconditionnels qui représentent une part prépondérante des transferts financiers de l’Etat .

Le ratio d’autonomie financière (ressources propres par rapport au total des ressources) n’a pas connu ces dernières années de progression notable en moyenne : 25,6% en 2010, 25,2% en 2015 et 27% en 2017, même si pendant cette période, dans de nombreuses municipalités ont été appliquées une augmentation des taxes et redevances locales. Un examen plus approfondi des 61 communes prises individuellement montre que le ratio d’autonomie financière varie de 3% à 68%, mettant en évidence des différences significatives dans leur dépendance vis-à-vis du gouvernement.

Ainsi, dans certaines petites communes (par exemple Finiq, 3500 habitants), les ressources propres ne représentent encore qu’une part très minoritaire (15%) de l’ensemble des ressources. Dans certaines villes moyennes elles peuvent représenter en revanche une part prépondérante de l’ensemble des ressources. Ainsi, dans une ville moyenne comme Lezhe (70 000 habitants), elles représentent 60% environ de l’ensemble des ressources.

Les transferts inconditionnels du budget de l'État, qui peuvent être librement utilisés par les communes, restent la principale source de financement, représentant plus de 50% des revenus pour 70% des nouvelles communes. À la fin de 2016, les recettes perçues par les municipalités sur les taxes et redevances locales étaient de 28% plus élevées qu'en 2015. En janvier-juin 2017, ces revenus ont à nouveau augmenté d'environ 28% par rapport à janvier-juin 2016. Le total des ressources financières du gouvernement local a enregistré un montant de 52 milliards ALL jusqu'à la fin de 2020, à savoir une légère augmentation de 0,2% par rapport à la même période de l'année précédente. Les revenus provenant de sources locales propres (taxes et tarifs locaux, activités avec actifs et autres) ont enregistré un montant d'environ 24,2 milliards de ALL, avec une diminution d'environ 5,3% en termes annuels, soit environ 1,4 milliards de moins que le niveau enregistré l’année précédente. Selon les collectivités considérées, les recettes provenant de leurs propres sources ont connu des résultats négatifs en raison d'une baisse de la collecte des recettes fiscales locales (-5%) et des tarifs locaux (-6,6%) au cours de cette période. 30 municipalités sur 61 ont réussi à avoir une performance de revenus positive pour cette période, tandis que les 31 collectivités locales restantes n'ont pas été en mesure de neutraliser la baisse des revenus provenant de leurs propres sources. Certaines des communes touchées par le séisme du 26 novembre 2019 ont enregistré une baisse significative de leurs revenus, comme la municipalité de Durrës , Krujë , Kurbin et Shijak .

Ainsi, depuis la mise en œuvre des réformes de l’autonomie locale en 2015, les ressources propres des collectivités ont pratiquement doublé et le financement des investissements sur fonds propres a été multiplié par quatre, sans pour autant atteindre encore un niveau suffisant.

Article 9.4
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l'évolution réelle des coûts de l'exercice de leurs compétences.


L’exigence de diversification des ressources implique que le financement des collectivités locales ne doit pas dépendre uniquement des impôts ou des transferts, mais reposer également sur toutes les recettes locales envisageables : transferts, impôts locaux, droits, taxes, redevances, bénéfices de droit privé, intérêts des comptes et dépôts bancaires, sanctions et amendes, vente de biens immobiliers ou d’avoir, services offerts au secteur privé, etc.

La loi 139/2015 dispose dans son article 34 que : « Les collectivités locales autonomes sont financées par les recettes provenant des impôts, taxes et autres recettes locales, par les fonds transférés par le gouvernement central et les fonds obtenus directement à partir des impôts et prélèvements nationaux partagés, des emprunts locaux, des dons et d'autres sources, conformément à la loi ».  En outre, « Le droit des collectivités locales autonomes de créer des revenus de manière indépendante est garanti par la loi ».

Le Conseil de la municipalité a par ailleurs le droit de créer des impôts temporaires pour la fourniture de services spécifiques et le financement d’investissements publics, pendant une période limitée (art.13 de la loi 68/2017).

Le caractère évolutif des ressources locales est également garanti si les changements de politique fiscale conduisent à une diminution des taux et de l'assiette des impôts locaux ou à une réduction de la part des recettes des collectivités locales provenant des impôts partagés, le Ministère des finances est légalement obligé de prendre des mesures pour compenser cette baisse par une augmentation des transferts financiers locaux. Par ailleurs, les fonctions et compétences transférées ou déléguées aux collectivités locales, ainsi que l'imposition de nouvelles normes nationales pour l’exécution d’une fonction doivent toujours être accompagnés des moyens financiers nécessaires à leur mise en œuvre (art. 4 de la loi n°68/2017 sur l’autonomie financière locale).

Ainsi, la loi 122/2020 modifiant la loi n ° 9632/2006, « Sur le système fiscal local », a exonéré les petites entreprises victimes de la pandémie de Covid19 de l'impôt sur les bénéfices. Étant donné que cette taxe a été attribuée aux municipalités, l'Association des communes a demandé une stricte compensation des pertes de recettes liée à cette réforme. Les ressources financières des municipalités paraissent ainsi suffisamment diversifiées et évolutives.

Article 10.1
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont le droit, dans l'exercice de leurs compétences, de coopérer et, dans le cadre de la loi, de s'associer avec d'autres collectivités locales pour la réalisation de tâches d'intérêt commun.


La loi de 2015 sur l’autonomie locale consacre son chapitre V à la coopération entre deux ou plusieurs unités d'autonomie locale. Elle prévoit tout d‘abord que pour remplir leurs fonctions et fournir des services spécifiques pour le bien commun, deux ou plusieurs unités d'autonomie locale au sein d'une région ou de régions différentes peuvent remplir ensemble toute fonction et / ou service assigné par la loi en concluant ou en mettant en œuvre des accords ou des contrats, en déléguant entre eux des pouvoirs et des responsabilités spécifiques ou en passant des contrats avec un tiers. Les accords de coopération intercommunale doivent définir les fonctions à exercer par chaque commune ou conjointement, les moyens pour atteindre les objectifs fixés, la durée et le degré de délégation des compétences, le montant respectif de la contribution financière et la méthode de partage des revenus et autres avantages.

L'accord de coopération intercommunale doit être approuvé par les conseils respectifs de chaque unité d'autonomie locale partie à l'accord. L'obligation financière de chacune des unités d'autonomie locale partie à l'accord est approuvée chaque année en tant que poste distinct du budget local. Dans la pratique des contrats de coopération entre municipalités ont été conclus notamment pour la gestion des déchets, de l’eau ou encore des réserves naturelles.

Par ailleurs, deux ou plusieurs unités d'autonomie locale au sein d'une région ou de régions différentes peuvent conclure des accords entre elles ou avec les institutions du gouvernement central pour la création d'une personne morale distincte auxquelles elles confèrent des compétences spécifiques. Cette personne morale est appelée « Autorité des compétences conjointes » (« Joint Powers Authority »). La contribution de chaque partie doit être indiquée avec précision, qu'il s'agisse de fonds, de services, d'équipements, de personnel qualifié ou de tout autre actif nécessaire pour atteindre les objectifs fixés. L'accord devient applicable après que le préfet ait fait une déclaration de légalité dans le délai prescrit par la loi.

Article 10.2
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Le droit des collectivités locales d'adhérer à une association pour la protection et la promotion de leurs intérêts communs et celui d'adhérer à une association internationale de collectivités locales doivent être reconnus dans chaque Etat.


La Constitution dispose que les collectivités locales ont le droit de former des syndicats et des institutions communes pour défendre leurs intérêts. L'Association des municipalités albanaises a été créée en 1993. Les principaux objectifs de l'Association sont notamment de protéger les intérêts communs des municipalités albanaises, d’établir des relations directes avec le Parlement et le gouvernement pour la protection des intérêts des organes de l'autonomie locale, de représenter les municipalités albanaises dans les relations avec d'autres organismes, de rendre possible la discussion des problèmes communs dans le cadre de l'association afin de trouver des solutions pratiques et de faciliter l'établissement de contacts entre les municipalités et leurs partenaires étrangers.

L’Association pour l’autonomie locale de l’Albanie, l’Association des régions et l’Association des municipalités d’Albanie constituent les instances représentatives des unités d’autonomie locale. Les collectivités locales sont consultées, par le biais de leurs associations représentatives de l'autonomie locale, ce qui leur permet de présenter leurs avis, commentaires et propositions sur les politiques et la législation qui ont un impact direct sur l'exercice de leurs droits et fonctions.

Article 10.3
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales peuvent, dans des conditions éventuellement prévues par la loi, coopérer avec les collectivités d'autres Etats.


L’article 14 de la loi de 2015 sur l’autonomie locale prévoit que les unités d'autonomie locale peuvent conclure des accords de coopération intercommunale avec les collectivités locales des États étrangers. Avant la conclusion de ces accords, les collectivités locales autonomes doivent demander l’avis du ministère des Affaires étrangères. En pratique, Il existe une coopération transfrontalière des collectivités locales albanaises avec la Grèce, la Macédoine du Nord, le Kosovo[15], le Monténégro et l’Italie dans plusieurs domaine comme le tourisme, l’environnement, le patrimoine culturel.

Article 11
Protection légale de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent disposer d'un droit de recours juridictionnel afin d'assurer le libre exercice de leurs compétences et le respect des principes d'autonomie locale qui sont consacrés dans la Constitution ou la législation interne.


Les collectivités locales peuvent introduire un recours auprès du tribunal administratif si elles estiment qu'il y a eu une violation de leur droit à l'autonomie (prévu par l'article 113/3 de la Constitution). D'autre part, toute personne peut s'adresser au tribunal si l'activité administrative des collectivités locales est contraire à la Constitution et aux lois et viole ses droits et intérêts légitimes.

Par ailleurs, l’article 134 de la Constitution permet aux autorités locales de saisir la Cour constitutionnelle de questions relatives à l’autonomie locale. De nombreuses saisines sont intervenues, émanant principalement des Associations de collectivités locales, portant par exemple sur des problèmes de répartition de compétence, de taxes locales, ou de permis de construire.

La jurisprudence de la Cour constitutionnelle en matière d’autonomie locale est très développée et il convient de souligner qu’elle se réfère directement aux principes posés par la Charte européenne de l’autonomie locale mentionnée dans les décisions.

L’article 115 de la Constitution prévoit quant à lui qu’en cas de dissolution d’un conseil municipal ou de révocation d’un maire pour violation grave de la Constitution ou des lois, un recours contre de telles décisions peut être formé, dans un délai de 15 jours, auprès de la Cour constitutionnelle, auquel cas la décision du Conseil des ministres est suspendue.

ADHESION

au Conseil de l’Europe

RATIFICATION

de la Charte européenne de l’autonomie locale

CONSTITUTION | LEGISLATION NATIONALE

L’organisation et le fonctionnement des gouvernements locaux en Albanie sont garantis par la Constitution albanaise et plusieurs actes juridiques.



30Disposition(s) ratifiée(s)
0Disposition(s) avec réserve(s)
0 Disposition(s) non ratifiée(s)
22Disposition(s) conforme(s)
7Articles partiellement conformes
1Article non conforme