Estonie

Estonie - Rapport de monitoring

Date de la visite de monitoring : du 6 au 8 septembre 2016
Date d'adoption du rapport: 29 mars 2017

Le présent rapport fait suite à la troisième visite de suivi en Estonie depuis la ratification de la Charte européenne de l’autonomie locale par ce pays en 1994. La situation de la démocratie locale en Estonie est globalement positive. Les rapporteurs relèvent les récentes initiatives soutenues par les autorités du pays permettant le renforcement des relations entre le pouvoir central et les autorités locales sur les questions financières ainsi que de la structure des collectivités locales grâce à une réforme territoriale en cours. Les rapporteurs saluent la ratification en 2011 par l’Estonie du Protocole additionnel sur le droit des autorités locales à participer aux affaires publiques. Le rapport met cependant en évidence le manque de clarté dans la distribution des compétences entre les autorités locales et centrales, l’inadéquation des financements des autorités locales avec leurs fonctions, l’absence de mécanismes de consultation des autorités locales à échéance régulière et dans des délais raisonnables.

 

Par conséquent, le Congrès recommande aux autorités estoniennes de clarifier leur législation sur la répartition des compétences entre les autorités locales et centrales, en garantissant qu’une part importante de celles-ci soit déléguée aux autorités locales. Il invite également le gouvernement à s’assurer que les autorités locales disposent de ressources adéquates et suffisantes pour leur permettre d’exercer leurs fonctions de manière autonome. A cet égard, les rapporteurs encouragent également les autorités estoniennes à renforcer le système de péréquation financière. Concernant les mécanismes de consultation, ils préconisent la mise en place des mesures permettant la tenue de consultations à échéance régulière et dont les délais ne soient pas trop courts.

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Article ratifié Ratifié avec réserve(s) Non ratifié
Conformité Conformité partielle Non conformité A déterminer
Tout déplier
Tout replier
Article 2
Fondement constitutionnel et légal de l'autonomie locale - Article ratifié

Le principe de l'autonomie locale doit être reconnu dans la législation interne et, autant que possible, dans la Constitution.


L’article 2 de la Charte requiert des pays signataires qu’ils reconnaissent le principe d’autonomie locale dans leur législation ou leur Constitution. Les rapporteurs notent d’une manière générale la conformité de la Constitution estonienne avec cette disposition de la Charte. Néanmoins, tant dans la Constitution que dans la législation, il est possible d’améliorer la protection juridique des principes de l’autonomie locale et de renforcer la continuité des politiques centrales vis-à-vis des collectivités locales.

 

En Estonie, les dispositions constitutionnelles pertinentes (chapitre XIV) remplissent l’exigence contenue dans la Charte : l’article 154, paragraphe 1, dispose que « toutes les affaires locales sont réglées et gérées par les collectivités locales, qui fonctionnent de manière indépendante conformément à la loi. » Les modalités détaillées figurent en particulier dans la loi sur l’organisation des collectivités locales, la loi sur la gestion financière des collectivités locales et la loi sur l’élection des conseils locaux.

 

A cet égard, l’article 3 de la Constitution donne une indication de la mesure dans laquelle les principes et les normes du droit international font partie de l’ordre juridique interne de l’Estonie. D’après l’article 2 de la loi sur la ratification de la Charte européenne de l’autonomie locale, la République d’Estonie s’engage à appliquer l’intégralité des articles de la Charte sur le territoire placé sous sa juridiction. La Charte énonce les conditions minimales que l’État doit garder à l’esprit dans l’organisation de l’autonomie locale, notamment pour ce qui concerne le financement des collectivités locales. Par conséquent, la Cour réunie en assemblée plénière a conclu que la Charte jouait un rôle important dans l’interprétation des dispositions de la Constitution concernant l’organisation de l’autonomie locale et que « par principe (…) les règles et principes du droit international communément reconnus s’appliquent directement dans l’ordre juridique estonien. Ces règles peuvent être invoquées devant les juridictions du pays. » Cela s’appliquerait aussi à la Charte européenne de l’autonomie locale. Aux termes de l’article 123(2) de la Constitution, lorsque des lois ou autres réglementations de l’Estonie sont en conflit avec un traité international ratifié par le Riigikogu, les dispositions du traité international s’appliquent.


https://www.president.ee/en/republic-of-estonia/the-constitution/

 

  • Voir le paragraphe 20 de l’arrêt n° 3-4-1-7-02 du 15 juillet 2002 de la Chambre de contrôle constitutionnel de la Cour suprême : http://www.nc.ee/?id=428
Article 3.1
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques.


La Charte dispose dans son article 3 que les collectivités locales doivent avoir « sous leur propre responsabilité (…) une part importante des affaires publiques ». Bien que l’instrument ne précise pas les tâches et fonctions devant relever de la compétence des collectivités locales, il conviendrait de leur confier en premier lieu la responsabilité des affaires publiques qui concernent la communauté locale au plus près et peuvent effectivement être menées par les autorités locales.

 

L’article 154(1) de la Constitution estonienne dispose que « toutes les affaires locales sont réglées et administrées par les collectivités locales, qui assument leurs responsabilités de manière autonome conformément à la loi ». Les détails sont énoncés au paragraphe 2 de la loi sur l’organisation des collectivités locales : L’autonomie locale est le droit, l’autorité et le devoir des organes de pouvoir constitués démocratiquement d’une collectivité locale prévue dans la Constitution – commune rurale ou ville – d’organiser et de gérer de manière indépendante les affaires locales conformément à la loi, sur la base des besoins et intérêts légitimes des résidents de la commune rurale ou ville concernée et eu égard au développement spécifique de cette commune rurale ou ville. 2) L’autonomie locale est : fondée sur la division du territoire de l’État en unités administratives ; exercée par des organes législatifs et exécutifs formés démocratiquement et, sur les questions locales, au moyen de sondages d’opinion ou d’initiatives publiques.

 

Les représentants de diverses institutions et associations, ainsi que des collectivités locales, ont insisté sur la nécessité de clarifier la question des tâches et fonctions obligatoires des collectivités locales et la manière de différencier au mieux les affaires locales et les responsabilités de l’État. La Chancelière de la justice a évoqué un débat actuel visant à éclaircir ce point et informé les rapporteurs que la manière de modifier la législation afin d’accorder une part plus importante des ressources financières aux collectivités locales restait l’une des questions examinées dans le cadre de la réforme actuelle. Les rapporteurs soulignent que la Chancelière de la justice peut agir de sa propre initiative si elle a des raisons de penser que la législation d’application générale n’est pas conforme à la Constitution et aux lois.

 

Une autre question importante a été soulevée par la Cour des comptes, lors de l’analyse de la part des affaires publiques exercées par les collectivités locales. Si la distinction entre les affaires nationales et locales n’est pas clairement établie, il y a un risque que les collectivités locales assument des fonctions de l’État, sur leur budget, au lieu d’en assigner les coûts directement à l’administration compétente de l’État. 


Réponses de la Chancelière à la liste indicative de questions n° 1.

Voir le chapitre I, article 1 « Responsabilités du Chancelier de la justice », paragraphe 1, de la loi sur le Chancelier de la justice, adoptée le 25.02.1999, RT I 1999, 29, 406, entrée en vigueur le 01.06.1999.

Article 3.2
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Ce droit est exercé par des conseils ou assemblées composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel et pouvant disposer d'organes exécutifs responsables devant eux. Cette disposition ne porte pas préjudice au recours aux assemblées de citoyens, au référendum ou à toute autre forme de participation directe des citoyens là ou elle est permise par la loi.


Concernant la conformité avec l’article 3, paragraphe 2, de la Charte, les rapporteurs n’ont entendu aucune critique relative à cette disposition, si ce n’est que les représentants de la ville de Tallinn ont critiqué le fait que la législation nationale prévoie que le nombre des conseillers municipaux ne puisse « être inférieur » à 79. De leur avis, le nombre des conseillers est trop important, surtout si on le compare à celui des membres du Parlement estonien (101). Les rapporteurs souscrivent à l’argument de base de la ville selon lequel les institutions locales (et de l’État) devraient être organisées de manière à concilier fonctionnalité optimale et économie budgétaire. Concernant les détails, l’article 154 de la Constitution estonienne renvoie à la législation nationale ainsi qu’à l’article 3 de la Charte. Le législateur national est donc libre d’organiser le cadre des activités des collectivités locales et de fixer le nombre des conseillers municipaux.

 

Concernant l’article 3, paragraphe 2, de la Charte, et plus précisément la participation directe des citoyens, les rapporteurs renvoient au chapitre III, point 6, des nouveaux « Principes de base » gouvernementaux et soutiennent les initiatives du gouvernement visant à renforcer tous les instruments – directs et indirects – de participation des citoyens au niveau local et, si nécessaire, national.

 

Les rapporteurs estiment que la situation en Estonie est globalement conforme aux dispositions de l’article 3 de la Charte. Cependant, ils insistent sur la nécessité de renforcer la démocratie locale en distinguant clairement les compétences de l’État et des collectivités locales. L’approche du gouvernement pour renforcer la démocratie locale, au moyen de fusions au sein d’unités territoriales de plus grande taille, doit être complétée par un renforcement des compétences et des finances des collectivités locales.


D’après le paragraphe 2(5) de l’article 7 de la loi sur l’élection des conseils des collectivités locales (LECCL) (en vigueur jusqu’au 16 décembre 2008), le conseil municipal de Tallinn ne pouvait compter moins de 63 membres. Avec l’amendement de la LECCL entré en vigueur le 17 décembre 2008, le législateur a augmenté le nombre minimal de conseillers municipaux de la ville de Tallinn, le portant à 79 (article 7, paragraphe 2, alinéa 8, de la LECCL).

Article 4.1
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences de base des collectivités locales sont fixées par la Constitution ou par la loi. Toutefois, cette disposition n'empêche pas l'attribution aux collectivités locales de compétences à des fins spécifiques, conformément à la loi


Voir réponses indiquées aux articles 4.2, 4.3, 4.4 et 4.6.

Article 4.2
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n'est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité


Les représentants des associations de pouvoirs locaux ont fortement insisté sur la conformité de la pratique estonienne avec l’article 4, paragraphe 2, de la Charte. A ce sujet les rapporteurs estiment que des améliorations seraient possibles quant à la législation et la pratique estoniennes. Différents aspects concourent à limiter la pleine « latitude [des collectivités locales] pour exercer leur initiative ». Comme il est indiqué plus haut, il n’existe pas de délimitation claire entre les affaires nationales et locales. Deuxièmement, sachant que l’État s’emploie actuellement à rationaliser l’organisation des services d’intérêt public, les collectivités locales ont indiqué craindre que cet effort fasse peser des contraintes financières supplémentaires sur la population locale et dégrade les conditions de vie et l’environnement économique locaux. Plusieurs exemples ont été soumis aux rapporteurs lors de la visite de monitoring: concernant la réorganisation des lieux d’apprentissage de la conduite, le nombre des unités pour l’ensemble du territoire a été réduit de 15 à 4. Cela affaiblira la capacité financière des ménages et, partant, la possibilité pour les collectivités locales d’augmenter les taxes locales. Troisièmement, les collectivités locales d’Estonie dépendent massivement d’allocations provenant du budget de l’État et leurs ressources propres potentielles sont de très loin insuffisantes pour remplir leurs tâches au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la Charte. Les rapporteurs estiment que cette disposition n’est pas respectée. 


Pendant le processus de consultation, le ministère des Finances a indiqué aux rapporteurs que la réforme de ces services est liée au secteur de l’État et que les conséquences pour les collectivités locales sont moins importantes, que les heures d’ouverture du service mentionné sont adaptées aux usagers » (voir https://www.mnt.ee/eng/organization/service-bureaus) et que la plupart des procédures peuvent être menées par voie électronique au moyen d’un service en ligne (voir https://eteenindus.mnt.ee/main.jsf)

Article 4.3
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

L'exercice des responsabilités publiques doit, de façon générale, incomber, de préférence, aux autorités les plus proches des citoyens. L'attribution d'une responsabilité à une autre autorité doit tenir compte de l'ampleur et de la nature de la tâche et des exigences d'efficacité et d'économie.

 


Concernant l’article 4, paragraphe 3, de la Charte, le principe de subsidiarité est largement accepté dans la pratique politique du pays ainsi que dans la juridiction nationale. Dans son arrêt n° 3-4-1-9-06 du 16 janvier 2007, la Cour suprême a conclu que « la restriction de la garantie des collectivités locales, imposée par l’article 13 de la loi sur les constructions (lequel dispose que les collectivités locales doivent veiller à organiser la construction des routes publiques, des espaces verts publics, de l’éclairage extérieur et des canalisations des eaux pluviales sur la base d’un cadastre détaillé excluant les parcelles mentionnées dans un permis de construire, sauf si la collectivité locale en question et la personne qui demande l’élaboration d’un cadastre détaillé ou celle qui demande le permis de construire en décident autrement), est adaptée à la réalisation de l’objectif mentionné ». Puisque c’est au niveau local que cet objectif peut être rempli le plus efficacement, la restriction est à la fois nécessaire et conforme au principe de subsidiarité découlant de l’article 4, paragraphe 3, de la Charte. L’applicabilité du principe de subsidiarité en Estonie est également mentionnée dans un autre arrêt de la Cour suprême (arrêt n° 3-3-1-41-06 du 3.12.2007).

Article 4.4
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences confiées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et entières. Elles ne peuvent être mises en cause ou limitées par une autre autorité, centrale ou régionale, que dans le cadre de la loi.

 


Concernant l’article 4, paragraphe 4, de la Charte, les rapporteurs souhaitent formuler les mêmes observations qu’au sujet du paragraphe 2. Par conséquent, la mise en œuvre de cette disposition n’est pas totalement garantie en pratique au niveau des collectivités locales. Les principes de la consultation sont énoncés dans les règles du Gouvernement de la République d’Estonie (en estonien). Ces règles, en particulier leur article 4 relatif à la coopération et la participation et leur article 6 relatif à la coordination (entente), disposent que les associations nationales de pouvoirs locaux doivent être consultées lorsque des projets de loi sont soumis au Parlement. Concrètement, les associations soumettent leurs commentaires sur les projets de textes via le système électronique d’information sur les lois. Les associations considèrent que dans l’ensemble elles sont dûment informées des nouvelles initiatives et consultées à leur sujet. Au niveau du Parlement, il convient de prendre note du « Règlement sur le parcours juridique des projets de textes examinées par le Riigikogu ». Lors du processus de consultation, la commission constitutionnelle du parlement a indiqué aux rapporteurs que la loi sur les règles de procédure et le Règlement intérieur du Riigikogu avait été modifiée le 13 mai 2016 (article 2, paragraphe 36) de manière à obliger la commission à inviter les groupes d’intérêts sollicités pour participer à la préparation du projet de loi à participer aussi à son examen. 


https://www.riigiteataja.ee/akt/119012011004?leiaKehtiv

Article 4.5
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

En cas de délégation des pouvoirs par une autorité centrale ou régionale, les collectivités locales doivent jouir, autant qu'il est possible, de la liberté d'adapter leur exercice aux conditions locales.


Voir réponses indiquées aux articles 4.2, 4.3, 4.4 et 4.6.

Article 4.6
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, autant qu'il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décision pour toutes les questions qui les concernent directement.

 


Concernant la consultation des collectivités locales en tant que parties à diverses procédures, la loi sur la procédure administrative (2001) est particulièrement pertinente. L’absence d’une audition, lorsque la loi permettrait sa tenue, est un vice de procédure essentiel, qui entraîne l’invalidation de l’acte administratif concerné. Pour ce qui est des procédures de consultation relatives à la modification des limites territoriales, l’article 158 de la Constitution de la République d’Estonie dispose que les limites territoriales des collectivités locales ne peuvent pas être modifiées sans prendre en considération l’avis des collectivités concernées. En matière de consultation relative au budget, l’article 46 de la loi sur le budget de l’État énonce des procédures spécifiques.

 

Néanmoins, la consultation semble poser des problèmes non seulement pratiques mais aussi structurels. Les associations critiquent la brièveté des délais (habituellement une période de consultation de 15 jours ouvrables est respectée). Les associations soulignent un autre point important : les projets de loi peuvent évoluer sensiblement au cours de leur examen par le Parlement. Une consultation continue des associations peut être nécessaire, mais n’est pas toujours réalisée, bien que les associations aient été associées aux travaux du comité de réforme. En règle générale, la consultation porte principalement sur les aspects pratiques d’un projet de loi ; et les collectivités locales sont moins impliquées dans les processus de discussion et de décision gouvernementaux portant sur les thèmes politiques fondamentaux. Une critique spécifique est venue des associations concernant la loi sur la réforme administrative : selon elles, le gouvernement n’a pas suffisamment communiqué sur les objectifs généraux de la réforme.

 

Les rapporteurs considèrent que l’article 4, paragraphe 6, de la Charte est formellement respecté en Estonie. Toutefois, les mécanismes de consultation pourraient être améliorés. Des informations plus détaillées devraient être fournies sur les projets à moyen et long terme et sur leurs conséquences pour les collectivités locales. La pratique de consultation devrait être adaptée à la nécessité pour les collectivités locales de suivre de près les processus de délibération. Le gouvernement devrait non seulement organiser la consultation sur une base formelle, conformément aux critères énoncés dans la Charte (en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décision pour toutes les questions qui les concernent directement), mais les consultations devraient aussi avoir lieu dans la pratique de manière régulière. Les rapporteurs considèrent que le processus de consultation entre les collectivités locales et le pouvoir central devrait dans l’ensemble être renforcé.

 

Pour résumer les constats ci-dessus, les rapporteurs considèrent que des problèmes de non-conformité se posent concernant la mise en œuvre des paragraphes 2 et 4 de l’article 4.


Voir la loi sur le budget de l’Etat, article 46, paragraphe 2 : www.riigiteataja.ee/en/compare_original?id=504072014004

Voir le communiqué de presse de l’Association des villes d’Estonie du 07.10. 2015 (il était annoncé notamment que le projet de loi sur l’enseignement élémentaire et l’enseignement secondaire supérieur présenté par le ministère de l’Éducation n’avait pas fait l’objet d’une concertation avec l’association).

Article 5
Protection des limites territoriales des collectivités locales - Article ratifié

Pour toute modification des limites territoriales locales, les collectivités locales concernées doivent être consultées préalablement, éventuellement par voie de référendum là où la loi le permet.


D’après l’article 158 de la Constitution de la République d’Estonie, les limites territoriales des collectivités locales ne peuvent être modifiées « sans prendre en considération l’avis des collectivités locales concernées ». Eu égard au projet de réforme actuel visant à fusionner un grand nombre des unités territoriales d’Estonie, il est utile de rappeler dans quel objectif l’avis des collectivités locales doit être entendu. Un des interlocuteurs a souligné à la délégation que « les collectivités locales doivent protéger l’autonomie locale et veiller à la conformité des décisions du pouvoir central avec l’intérêt public. L’avis des collectivités locales doit être argumenté et permettre de savoir si la modification des limites territoriales permettra d’atteindre les objectifs visés. A l’appui de cette conclusion, la Constitution n’exclut pas que des limites territoriales soient modifiées contre la volonté de la collectivité concernée. »

 

A cet égard, il est à mentionner que la Cour suprême, dans son arrêt du 20 décembre 2016, a déclaré ce qui suit (point 136) : « L’obligation d’obtenir l’avis des habitants ne découle pas de l’article 158 de la Constitution. La Chambre estime qu’il découle de cet article une obligation pour le pouvoir exécutif de l’État d’entendre l’avis de la collectivité locale. La Chambre note aussi que la Charte européenne de l’autonomie locale n’exige pas d’entendre l’avis de la population locale. L’article 5 de la Charte dispose ce qui suit : « Pour toute modification des limites territoriales locales, les collectivités locales concernées doivent être consultées préalablement, éventuellement par voie de référendum là où la loi le permet. » Par conséquent, la Charte permet à l’État de décider d’organiser ou non un référendum, lequel dans l’ordre juridique de l’Estonie a un caractère contraignant, ou un référendum consultatif, lequel dans l’ordre juridique de l’Estonie n’a pas de caractère contraignant, ou encore de déléguer à la collectivité locale la responsabilité d’exprimer l’avis des habitants. »

Article 6.1
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Sans préjudice de dispositions plus générales créées par la loi, les collectivités locales doivent pouvoir définir elles mêmes les structures administratives internes dont elles entendent se doter, en vue de les adapter à leurs besoins spécifiques et afin de permettre une gestion efficace.


L’article 154, paragraphe 1, de la Constitution estonienne dispose que « toutes les affaires locales sont réglées et gérées par les collectivités locales, qui fonctionnent de manière indépendante conformément à la loi. » La compétence organisationnelle des collectivités locales pour décider de la manière de gérer les affaires locales est elle-même une « affaire locale » et ne peut pas être restreinte par le gouvernement. Ce droit n’est restreint ni dans la disposition constitutionnelle susmentionnée ni dans la loi sur l’organisation des collectivités locales ou une autre loi. La Cour suprême d’Estonie, dans son arrêt n° 3-4-1-12-09, a fourni quelques explications concernant les principes qui régissent l’organisation interne des collectivités locales, indiquant notamment ce qui suit : « le droit à l’autonomie n’est pas un droit absolu ; toutefois, l’autorité centrale de l’État ne peut restreindre ce droit qu’au moyen de mesures qui sont proportionnées et conformes à un objectif légitime clairement défini. »

 

Les rapporteurs n’ont eu connaissance, de la part de représentants des collectivités locales, d’aucune objection au sujet d’une éventuelle violation de l’article 6 de la Charte, à l’exception des critiques susmentionnées de la ville de Tallinn concernant le nombre des conseillers municipaux. Cependant, des critiques répétées ont été formulées concernant la faible autonomie financière des collectivités locales, qui les empêche de créer des structures d’administration locale efficaces, en particulier dans les zones rurales. D’après les associations, il est fréquent dans les petites communes qu’un seul employé cumule plusieurs domaines d’activité. Du fait qu’il y a peu de travail pour des spécialistes d’un domaine donné, et que la préférence est accordée à des personnes polyvalentes, le recrutement de personnels qualifiés pose problème. La rémunération est comparable dans les communes de taille (et de budget) similaire. Cette question sera traitée au sujet de l’article 9 de la Charte. Les rapporteurs renvoient par ailleurs au chapitre VIII, point 2, des « Principes de base » : « Nous mènerons une réforme administrative en vue d’accroître le pouvoir de décision et la responsabilité des collectivités locales dans la gestion et l’organisation de la vie publique ». Les détails n’étant pas connus à ce stade, les rapporteurs recommandent d’examiner ultérieurement les développements intervenus concernant cet aspect de l’article 6 de la Charte. 


Voir l’arrêt n° 3-4-1-2-09, du 9 juin 2009, de la Chambre de contrôle constitutionnel de la Cour suprême, paragraphe 32.

Article 6.2
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Le statut du personnel des collectivités locales doit permettre un recrutement de qualité, fondé sur les principes du mérite et de la compétence; à cette fin, il doit réunir des conditions adéquates de formation, de rémunération et de perspectives de carrière.


Pour ce qui concerne la rémunération des personnels locaux, les associations n’ont globalement formulé aucune objection au sujet des consignes gouvernementales. Concernant la rémunération des enseignants, qui sont des agents locaux, le gouvernement a eu recours à des dotations réservées à cette fin.


Les collectivités locales gèrent librement leurs ressources humaines ; l’État ne fixe aucun plafond pour leur rémunération. Dans de rares cas, lorsqu’une collectivité locale est placée sous le contrôle de l’État (parce qu’elle est déclarée en faillite), la commune doit adopter un plan de redressement, lequel doit être soumis au ministère des Finances. Celui-ci peut demander de modifier le plan.

Article 7.1
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Le statut des élus locaux doit assurer le libre exercice de leur mandat.


Les rapporteurs n’ont eu connaissance d’aucune objection concernant la compatibilité des règles et pratiques estoniennes avec l’article 7 de la Charte. Les dispositions détaillées sur les conseils municipaux figurent dans l’article 156 de la Constitution et le chapitre 2 de la loi sur l’organisation des collectivités locales, ainsi que dans la loi sur l’élection des conseils municipaux. Les dispositions relatives à la rémunération se trouvent dans l’article 17, paragraphe 3, de la loi sur l’organisation des collectivités locales.

 

Le cumul de deux mandats, devant entrer en vigueur prochainement, au conseil municipal et au Parlement est un sujet de préoccupation. Les associations doutent que ce projet de réforme renforce l’autonomie locale. Comme déjà mentionné. Les rapporteurs renvoient à des projets dans d’autres États membres du Conseil de l’Europe (par exemple en France), visant à distinguer les fonctions dans le but déclaré d’empêcher la confusion entre les affaires locales et nationales.

Article 7.3
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Les fonctions et activités incompatibles avec le mandat d'élu local ne peuvent être fixées que par la loi ou par des principes juridiques fondamentaux.


Voir réponse indiquée à l’article 7.1.

Article 7.2
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Il doit permettre la compensation financière adéquate des frais entraînés par l'exercice du mandat ainsi que, le cas échéant, la compensation financière des gains perdus ou une rémunération du travail accompli et une couverture sociale correspondante.


Voir réponse indiquée à l’article 7.1.

Article 8.1
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif sur les collectivités locales ne peut être exercé que selon les formes et dans les cas prévus par la Constitution ou par la loi.


Le principe relatif au contrôle des collectivités locales est énoncé dans l’article 160 de la Constitution : « L’administration des collectivités locales et le contrôle de leurs activités sont régis par la loi. » Les modalités détaillées sont contenues dans les articles 66 et 66.1 de la loi sur l’organisation des collectivités locales. Il existe deux grandes formes de contrôle des communes : le contrôle interne est assuré par le comité d’audit, le conseil et l’organe exécutif de la collectivité locale ; le contrôle externe l’est par le gouverneur du comté, le Chancelier de la justice et la Cour des comptes. Le contrôle administratif des activités des exécutifs locaux est également exercé par divers ministères, comités et inspections (par exemple le ministère des Finances, l’Inspection pour la protection des données, l’Inspection pour la langue, l’Inspection du travail, etc.). Le ministre de l’Administration publique en fonction a décrit les principales fonctions de contrôle comme suit : le gouverneur du comté a le droit de contrôler les mesures législatives individuelles des conseils municipaux et des collectivités locales. Pour autant, il n’a pas autorité pour interrompre ou annuler une telle mesure : il peut uniquement suggérer à la collectivité locale concernée de prendre les mesures nécessaires pour se conformer à la loi. Si la commune ne fait rien pour mettre l’acte en conformité avec la loi le gouverneur de comté doit porter l’affaire en justice. Le Chancelier de la justice examine les réglementations des collectivités locales, du point de vue de leur conformité avec la Constitution et la législation. La Cour des comptes exerce un contrôle économique sur les collectivités locales, dans la mesure où elles utilisent des biens meubles et immeubles de l’État qui leur ont été transférés. Elle contrôle aussi l’utilisation par les collectivités locales des allocations destinées à une fin spécifique (comme les dotations réservées), des subventions accordées sur le budget de l’État et des fonds alloués pour l’exercice de fonctions de l’État. Le mandat de la Cour des comptes inclut aussi l’audit des collectivités locales concernant la possession, l’utilisation et la cession de biens municipaux ; le contrôle des fondations et des associations sans but lucratif financées par une collectivité locale ou dont une collectivité locale est membre, ainsi que les sociétés sur lesquelles une collectivité locale exerce une influence prépondérante par la détention d’une majorité de ses parts ou d’une autre manière, et les filiales de telles sociétés. Elle vérifie que les fonds publics ont été utilisés de manière judicieuse – économique, efficiente et efficace – et légale. Afin de ne pas aller à l’encontre du principe d’autonomie des collectivités locales, la Cour des comptes ne peut cependant pas évaluer l’opportunité des activités des collectivités locales ni leur utilisation des fonds. En d’autres termes, la Cour des comptes ne peut pas conduire des audits de performance des collectivités locales. Par ailleurs, la Cour des comptes a aussi le droit de soumettre des propositions au Gouvernement, aux ministres et aux collectivités locales pour des projets de législation ou la modification de la législation en vigueur. Le contrôle vise à garantir la légalité et l’adéquation des activités municipales. Les rapporteurs estiment que les exigences de l’article 8 sont respectées en Estonie.

 

Afin d’interpréter la portée des limites légales du contrôle administratif des collectivités locales, la Cour suprême d’Estonie s’est référée directement à l’article 8 de la Charte : « Afin de préserver en essence le droit des collectivités locales à l’auto-organisation, la restriction de ce droit doit être proportionnée, c’est-à-dire adaptée à la réalisation du but visé, nécessaire et raisonnable (voir l’arrêt du 16 janvier 2007 de la Chambre de contrôle constitutionnel de la Cour suprême dans l’affaire n° 3-4-1-9-06 – RT III 2007, 3, 19 ; paragraphe 23). La même exigence concernant le contrôle administratif est exprimée dans l’article 8, paragraphe 3, de la Charte. » Dans cet arrêt, la Cour affirme que « la Charte n’interdit pas le contrôle économique portant sur les actifs de l’État alloués aux collectivités locales dans les conditions énoncées à l’article 6 de la loi sur la Cour des comptes, si ce contrôle est exercé – conformément à l’article 8, paragraphe 2, de la Charte – selon les procédures et dans les cas prévus par la Constitution et la législation. » Toutefois, concernant les limites de cet aspect du contrôle, « le contrôle de l’utilisation, de la possession et de la cession de biens municipaux serait contraire à la Charte. Cette possibilité n’est pas prévue dans la loi sur la Cour des comptes. »

 

Pour ce qui concerne la pratique de contrôle en lien avec le projet de réforme administrative, le ministre de l’Administration publique en fonction a expliqué aux rapporteurs que lors de la phase volontaire il y aurait un contrôle minimal, limité à la légalité des procédures, des accords de fusion et des autres décisions prises par les conseils locaux pour la préparation de la réforme. Outre le contrôle de légalité, le ministère de l’Administration publique emploie sept consultants qui assistent toutes les communes qui souhaitent recevoir des conseils supplémentaires sur les fusions. Une de leurs tâches consiste à soutenir le processus de préparation et à veiller à ce que les populations locales y soient associées. Au cours de la phase introduite par l’État, les gouverneurs de comté joueront un plus grand rôle – de soutien, non de contrôle – et, dans certains cas, prendront l’initiative du processus de fusion. La phase volontaire s’achevant début 2017, l’État engagera mi-février un processus de fusion conformément à sa réglementation, afin que les élections des conseils municipaux puissent avoir lieu en octobre. Dans le cadre de ce processus les populations concernées seront consultées et l’avis des collectivités locales sera sollicité. Les rapporteurs suivront avec intérêt la poursuite ou non, par le nouveau gouvernement, de la stratégie de contrôle engagée par son prédécesseur, ou une éventuelle modification, complète ou partielle, des procédures administratives.


La compétence de contrôle du gouverneur de comté sur les activités des collectivités locales est régie par l’article 85 de la loi sur le gouvernement de la République.

Voir l’article 4, paragraphe 2, de l’arrêt n° 3-4-1-1-98 du 5 février 1998 de la Chambre de contrôle constitutionnel de la Cour suprême.

Article 8.2
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif des actes des collectivités locales ne doit normalement viser qu'à assurer le respect de la légalité et des principes constitutionnels. Le contrôle administratif peut, toutefois, comprendre un contrôle de l'opportunité exercé par des autorités de niveau supérieur en ce qui concerne les tâches dont l'exécution est déléguée aux collectivités locales.


Voir réponse indiquée à l’article 8.1.

Article 8.3
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Le contrôle administratif des collectivités locales doit être exercé dans le respect d'une proportionnalité entre l'ampleur de l'intervention de l'autorité de contrôle et l'importance des intérêts qu'elle entend préserver.


Voir réponse indiquée à l’article 8.1.

Article 9.8
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Afin de financer leurs dépenses d'investissement, les collectivités locales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché national des capitaux.


Voir réponses indiquées aux articles 9.1, 9.2, 9.3, 9.4, 9.5, 9.6 et 9.7.

Article 9.7
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L'octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence.


Concernant l’article 9, paragraphe 7, de la Charte, les rapporteurs se réfèrent à l’arrêt n° 3-3-1-74-15 du 20 avril 2016 de la Cour suprême, selon lequel : « Il ressort de l’article 9, paragraphe 7, que les aides basées sur un projet ne sont pas exclues mais sont si possible à éviter. Tandis qu’il découle de la Charte que la liberté d’action des collectivités locales est restreinte en cas d’octroi réservé d’une part importante d’aides à la mise en œuvre de projets spécifiques, on ne peut conclure à l’existence d’une telle influence si les aides en question sont comparativement négligeables par rapport à l’ensemble des revenus ». En conclusion, la Cour affirme que les dotations réservées sont conformes à l’article 9, paragraphe 7, de la Charte si ces aides « sont comparativement négligeables par rapport à l’ensemble des revenus ». Les rapporteurs estiment que l’Estonie, en respectant ce critère, est en conformité avec l’article 9, paragraphe 7, de la Charte.

Article 9.6
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, d'une manière appropriée, sur les modalités de l'attribution à celles ci des ressources redistribuées.


Les rapporteurs ont déjà mentionné l’article 46 de la loi sur le budget de l’Etat, qui contient des procédures spécifiques concernant les négociations entre les collectivités locales, les associations et les représentants de l’Etat sur les questions budgétaires. Ils recommandent de renforcer la position des associations à la fin du processus de négociation en vue de leur donner davantage qu’un droit formel de participation. En effet, la négociation aboutit très souvent à la signature d’un procès-verbal destiné à prouver qu’il y a bien eu négociation. Sur cette question, l’article 46 de la loi sur le budget de l’État va plus loin que l’article 9, paragraphe 6, de la Charte. Il inclut une véritable volonté, de part et d’autre, de trouver par la négociation un accord sur les éléments déterminants pour les finances locales. Les rapporteurs suggèrent qu’à la fois les associations et le ministère compétent développent un dispositif de négociation commun, qui couvrirait les principaux thèmes à traiter et serait aussi conforme à la législation européenne pertinente au sein du « Two Pack » et du « Six Pack » destinés à améliorer la stabilité financière de tous les niveaux de gouvernance. 

Article 9.5
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

La protection des collectivités locales financièrement plus faibles appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou des mesures équivalentes destinées à corriger les effets de la répartition inégale des sources potentielles de financement ainsi que des charges qui leur incombent. De telles procédures ou mesures ne doivent pas réduire la liberté d'option des collectivités locales dans leur propre domaine de responsabilité.


L’article 9, paragraphe 5, de la Charte n’est qu’en partie respecté en Estonie. D’après l’arrêt constitutionnel n° 3-4-1-8-09 du 16 mars 2010, « les mécanismes de péréquation financière ou autres mesures analogues doivent être appliqués au bénéfice des collectivités locales les moins prospères de manière à compenser le partage inégal des sources potentielles de recettes et de dépenses entre les collectivités locales ». L’État a adopté, dans l’article 46 de la loi sur le budget de l’État, des instruments destinés à organiser les transferts verticaux en faveur des collectivités locales. Sachant qu’en 2016 le fonds de péréquation a bénéficié à 173 communes sur 213, la dotation globale du fonds – 75 millions € – ne suffit pas à couvrir les besoins des collectivités locales. Les rapporteurs suggèrent d’augmenter la dotation de ce fonds – comme l’a proposé le ministre de l’Administration publique en fonction – et de réviser intégralement le système lorsque la réforme territoriale aura été menée à bien. Les unités d’autorité locale seront moins nombreuses et plus efficaces si la réforme aboutit. Outre les projets de réforme contenus dans les « Principes de base » visant à renforcer l’autonomie budgétaire des collectivités locales, de nouveaux instruments verticaux et horizontaux pourraient améliorer le système de péréquation financière de l’Estonie. 

Article 9.3
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d'impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.


Concernant la conformité avec l’article 9, paragraphe 3, de la Charte, le tableau des recettes locales de 2015 présenté par le ministre montre clairement que les recettes fiscales propres des collectivités locales sont largement insuffisantes. Les associations ont démontré que ces taxes (à savoir les taxes sur la publicité, la fermeture de rues, les véhicules à moteur et les animaux domestiques, ainsi que les frais de stationnement) représentent environ 1 % des recettes. Cette situation n’est pas conforme à la Charte.

Article 9.2
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi.


Concernant l’article 9, paragraphe 2, de la Charte, le respect de l’arrêt de 2009 de la Cour suprême, relatif à la nécessité d’une distinction claire entre les affaires de l’État et des collectivités locales, fait l’objet d’une interprétation différente. Le gouvernement considère qu’il y a eu une évaluation suffisante des tâches et qu’une distinction claire existe. Les associations ont un point de vue différent. Les rapporteurs se réfèrent à l’arrêt de la Cour suprême susmentionné, car les conséquences d’une distinction claire entre les affaires de l’État et des collectivités locales touchent aussi aux questions financières. En l’absence d’une telle distinction, les collectivités locales courent toujours le risque de devoir financer des compétences déléguées de l’État, bien que celles-ci doivent normalement être financées en totalité par l’État, que ce soit directement ou par le biais de dotation réservées. 


Voir l’article 46 de l’arrêt n° 3-4-1-2-09 de la Cour suprême du 9 juin 2009.

Article 9.1
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l'exercice de leurs compétences.


Concernant la conformité avec l’article 9 de la Charte, les rapporteurs estiment que le système global des finances locales présente une importante marge d’amélioration, non seulement pour ce qui est du montant total des ressources financières et des dépenses allouées aux collectivités locales, mais aussi du point de vue de l’autonomie liée aux ressources propres, des procédures de répartition telles que la péréquation et des dispositifs spécifiques de soutien. Les rapporteurs renvoient à la recommandation de 2010 du Congrès, qui soulevait déjà des questions similaires.

 

Les rapporteurs sont conscients des défis majeurs auxquels l’Estonie a été confrontée à la suite de la crise financière et économique de 2008. Ces événements ont indéniablement pesé dans une large mesure sur la politique budgétaire du pays et sur les relations financières entre les différents niveaux d’autorité, et pourraient légalement autoriser une modification des transferts financiers de l’État aux collectivités locales. Bien que les représentants de l’État et des collectivités locales puissent avoir une perception différente sur les questions liées au juste équilibre des bénéfices et des charges résultant de chocs extérieurs sur l’économie et sur la manière de répartir les conséquences financières entre les niveaux d’autorité, les rapporteurs estiment qu’il y a eu depuis lors un important redressement économique et financier au niveau national, qui a assurément eu des effets positifs sur les finances locales, mais pourrait par ailleurs avoir donné lieu à une politique budgétaire plus généreuse ayant une incidence particulière pour les finances des collectivités locales.


Vallo Olle, The Financial Guarantee of Local Government and Possibilities for its Protection (http://www.juridicainternational.eu/index.php?id=14968)

Voir le paragraphe 6.b, c, d, e et f de la Recommandation 294(2010) du Congrès sur la démocratie locale en Estonie.

Voir l’article 68 de l’arrêt n° 3-4-1-8-09 de la Cour suprême du 16 mars 2010.

Article 9.4
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l'évolution réelle des coûts de l'exercice de leurs compétences.


Le même constat peut être fait concernant la conformité avec l’article 9, paragraphe 4, de la Charte. Le système estonien de financement des collectivités locales n’est ni diversifié ni évolutif, et il dépend massivement des dotations et transferts de l’État. Même si une part importante de l’impôt sur le revenu des ménages (qui représente environ 50 % des recettes locales) est transférée aux collectivités locales (d’après l’article 5 de la loi relative à l’impôt sur le revenu des ménages, 11,6 % du salaire total des contribuables vont aux budgets locaux et le reste du produit de cet impôt va au budget de l’État), cette recette fiscale n’est pas légalement une taxe partagée entre différents niveaux d’autorité. L’État a toute discrétion pour fixer le taux et l’assiette de cet impôt, ainsi que – dans le cadre du budget annuel – la part du transfert du budget de l’État vers les collectivités locales. Les propositions de réforme de l’impôt sur le revenu des ménages auront probablement aussi des conséquences sur la part locale de cet impôt.


Voir l’article 66 de l’arrêt n° 3-4-1-8-09 de la Cour suprême du 16 mars 2010.

Voir l’article 29 de l’arrêt n° 3-3-1-46-03 de la Cour suprême du 19 avril 2010, qui pourrait accorder au gouvernement une plus grande marge de discrétion concernant l’architecture financière des collectivités locales d’Estonie.

Lors du processus de consultation, le ministère des Finances a affirmé qu’aux termes de la loi relative à l’impôt sur le revenu des ménages des exonérations fiscales étaient appliquées à la part du budget de l’État et que la réforme fiscale menée actuellement et l’augmentation du seuil n’auraient pas d’incidence sur les recettes des collectivités locales.

Voir le chapitre II, « Politique économique, investissements de l’Etat et taxation », des « Principes de base de la coalition gouvernementale entre le Parti centriste estonien, le Parti social-démocrate estonien et l’Union Pro Patria et Res Publica (IRL) pour 2016-2019 ».

Article 10.1
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont le droit, dans l'exercice de leurs compétences, de coopérer et, dans le cadre de la loi, de s'associer avec d'autres collectivités locales pour la réalisation de tâches d'intérêt commun.


La Charte requiert des États signataires qu’ils garantissent le droit des collectivités locales de coopérer et, dans le cadre de la loi, de s’associer avec d’autres collectivités locales pour la réalisation de tâches d’intérêt commun. Les rapporteurs n’ont eu connaissance d’aucune remarque ni critique de la part des représentants des collectivités locales et de leurs associations au sujet de cette disposition. Concernant l’avenir des deux associations, il existe semble-t-il des projets visant à réorganiser la représentation des collectivités locales d’Estonie lorsque la réforme territoriale aura été menée à bien.

Article 10.2
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Le droit des collectivités locales d'adhérer à une association pour la protection et la promotion de leurs intérêts communs et celui d'adhérer à une association internationale de collectivités locales doivent être reconnus dans chaque Etat.


Voir réponse indiquée à l’article 10.1.

Article 10.3
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales peuvent, dans des conditions éventuellement prévues par la loi, coopérer avec les collectivités d'autres Etats.


Voir réponse indiquée à l’article 10.1.

Article 11
Protection légale de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent disposer d'un droit de recours juridictionnel afin d'assurer le libre exercice de leurs compétences et le respect des principes d'autonomie locale qui sont consacrés dans la Constitution ou la législation interne.


La Cour suprême a souligné l’importance du contrôle juridictionnel afin de garantir l’autonomie locale en Estonie. La Chancelière de la justice a indiqué aux rapporteurs que les collectivités locales avaient toujours eu le droit de s’adresser à un tribunal administratif pour obtenir la protection de leurs droits légitimes concernant l’application de la loi ou d’autres actes à caractère plus général. La loi de 2002 sur la procédure judiciaire de contrôle constitutionnel a donné aux collectivités locales un autre recours effectif pour se protéger directement contre un acte à caractère général (y compris la loi). Aux termes de cette loi, « le conseil municipal peut demander à la Cour suprême de déclarer contraires à la Constitution une loi qui a été promulguée mais n’est pas encore entrée en vigueur ou une réglementation du Gouvernement de la République ou d’un ministère non encore entrée en vigueur, ou d’abroger une loi entrée en vigueur, une réglementation du Gouvernement de la République ou d’un ministère, ou une de leurs dispositions, si ce texte est contraire aux garanties constitutionnelles de l’autonomie locale. »

 

Compte tenu de la compétence étendue, diversifiée et permanente de la Cour suprême concernant les questions d’autonomie locale et les possibilités pour les collectivités locales de s’adresser au Président de la République (affaires relevant de l’article 107 de la Constitution), au Chancelier de la justice (affaires relevant de l’article 142 de la Constitution et contrôle de la conformité des accords internationaux avec la Constitution), à la Cour des comptes ou aux tribunaux administratifs (article 152 de la Constitution) si elles arrivent à la conclusion qu’il pourrait y avoir de la part des administrations de l’État une violation des principes fondamentaux de l’autonomie locale, les rapporteurs sont convaincus que la situation en Estonie est conforme à l’article 11 de la Charte.


Voir l’article 71 de l’arrêt n° 3-4-1-8-09 du 16 mars 2010 de la Cour suprême réunie en assemblée plénière et l’article 20 de l’arrêt n° 3-4-1-9-09 du 30 septembre 2009 de la Cour suprême.

Article 12.1
Engagements - Non ratifié

Toute Partie s'engage à se considérer comme liée par vingt au moins des paragraphes de la partie I de la Charte dont au moins dix sont choisis parmi les paragraphes suivants:

 

– article 2,

– article 3, paragraphes 1 et 2,

– article 4, paragraphes 1, 2 et 4,

– article 5,

– article 7, paragraphe 1,

– article 8, paragraphe 2,

– article 9, paragraphes 1, 2 et 3,

– article 10, paragraphe 1,

– article 11.


115. L’Estonie n’a formulé aucune réserve ni déclaration concernant les dispositions de la Charte. 9. LE PROTOCOLE ADDITIONNEL 116. L’Estonie a signé le Protocole additionnel à la Charte européenne de l’autonomie locale sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales (STCE n° 207) le 16 novembre 2009 et l’a ratifié le 20 avril 2011. Le Protocole est entré en vigueur pour ce pays le 1er juin 2012. La Cour suprême a, dans plusieurs de ses arrêts, accepté le Protocole additionnel en tant que base juridique valide pour contrôler la constitutionnalité des lois estoniennes97.


97 Voir l’arrêt n° 3-4-1-47-13 du 15 octobre 2013 : « La Chambre de contrôle constitutionnel conclut que la disposition légale contenue dans la loi sur l’élection des collectivités locales n’est pas contraire à la Constitution, au Protocole additionnel à la CEAL sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales ni à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ».

Article 12.2
Engagements - Non ratifié

Chaque Etat contractant, au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation, notifie au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe les paragraphes choisis conformément à la disposition du paragraphe 1 du présent article.


115. L’Estonie n’a formulé aucune réserve ni déclaration concernant les dispositions de la Charte. 9. LE PROTOCOLE ADDITIONNEL 116. L’Estonie a signé le Protocole additionnel à la Charte européenne de l’autonomie locale sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales (STCE n° 207) le 16 novembre 2009 et l’a ratifié le 20 avril 2011. Le Protocole est entré en vigueur pour ce pays le 1er juin 2012. La Cour suprême a, dans plusieurs de ses arrêts, accepté le Protocole additionnel en tant que base juridique valide pour contrôler la constitutionnalité des lois estoniennes97.


97 Voir l’arrêt n° 3-4-1-47-13 du 15 octobre 2013 : « La Chambre de contrôle constitutionnel conclut que la disposition légale contenue dans la loi sur l’élection des collectivités locales n’est pas contraire à la Constitution, au Protocole additionnel à la CEAL sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales ni à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ».

Article 12.3
Engagements - Non ratifié

Toute Partie peut, à tout moment ultérieur, notifier au Secrétaire Général qu'elle se considère comme liée par tout autre paragraphe de la présente Charte, qu'elle n'avait pas encore accepté conformément aux dispositions du paragraphe 1 du présent article. Ces engagements ultérieurs seront réputés partie intégrante de la ratification, de l'acceptation ou de l'approbation de la Partie faisant la notification et porteront les mêmes effets dès le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de trois mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire Général.


115. L’Estonie n’a formulé aucune réserve ni déclaration concernant les dispositions de la Charte. 9. LE PROTOCOLE ADDITIONNEL 116. L’Estonie a signé le Protocole additionnel à la Charte européenne de l’autonomie locale sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales (STCE n° 207) le 16 novembre 2009 et l’a ratifié le 20 avril 2011. Le Protocole est entré en vigueur pour ce pays le 1er juin 2012. La Cour suprême a, dans plusieurs de ses arrêts, accepté le Protocole additionnel en tant que base juridique valide pour contrôler la constitutionnalité des lois estoniennes97.


97 Voir l’arrêt n° 3-4-1-47-13 du 15 octobre 2013 : « La Chambre de contrôle constitutionnel conclut que la disposition légale contenue dans la loi sur l’élection des collectivités locales n’est pas contraire à la Constitution, au Protocole additionnel à la CEAL sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales ni à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ».

ADHESION

au Conseil de l’Europe

RATIFICATION

de la Charte européenne de l’autonomie locale

CONSTITUTION | LEGISLATION NATIONALE

En Estonie, les dispositions constitutionnelles pertinentes (chapitre XIV) remplissent l’exigence contenue dans la Charte : l’article 154, paragraphe 1, dispose que « toutes les affaires locales sont réglées et gérées par les collectivités locales, qui fonctionnent de manière indépendante conformément à la loi. »



30Disposition(s) ratifiée(s)
0Disposition(s) avec réserve(s)
3 Articles non ratifiés
21Disposition(s) conforme(s)
1Disposition(s) partiellement conforme(s)
4Disposition(s) non conforme(s)